Que réserve 2008 aux Congolais ? Sans usurper les facultés des devins, Le Potentiel soutient, après une étude minutieuse, que l'année sera cruciale. En effet, les animateurs des institutions de la 3ème République auront à faire face à des défis autrement plus rudes. Ils devront prouver leurs capacités notamment dans la recherche d'une paix insaisissable dans les Kivu, la concrétisation du vaste programme des chantiers du président, la stratégie pour accéder au point d'achèvement des PPTE, la disponibilisation du budget de l'Etat 2008 dès le 1er janvier, la mise en route de différentes réformes promises. Entre autres celles des entreprises publiques, du système judiciaire et de la Fonction publique. Il appartiendra alors au peuple d'apprécier les performances, ou non, de ses élus, deux ans après les scrutins qui les ont portés au pouvoir.
Le bilan 2007 du gouvernement de la République est à tous égards controversé, après une année de fonctionnement. Il est «globalement négatif» pour l'Opposition. «Partiellement positif» pour la Majorité. Constat : c'est de bonne guerre en démocratie.
Le passé est derrière mais il doit aider les institutions à faire mieux pour l'avenir. C'est que l'indulgence dont bénéficie le gouvernement à la fin de l'année 2007 ne lui sera pas renouvelée en décembre 2008. Les électeurs, quoi qu'il en soit, se feront plus exigeants à moins de trois ans de nouveaux scrutins. Dans l'ambiance qui attend l'Exécutif congolais, dès le 1er janvier 2008, il est des questions que nul responsable de la res publica n'a le droit d'éluder. A moins de conduire le pays en dehors de toute absence de vision, alors que des paramètres objectifs existent pour ce faire.
Sécurité à l'Est, un défi majeur
A quoi s'attendent effectivement les populations congolaises dans leur diversité ? Quelles seront les priorités du gouvernement pour répondre à leurs multiples espoirs ? De quels moyens financiers disposera le Trésor public, tant en ressources propres qu'en apports extérieurs, pour rencontrer tant soit peu les préoccupations des citoyens ? Ces questions, et bien d'autres encore non expressément formulées, constituent autant de défis auxquels sera confronté le gouvernement de la République à l'aube de l'année 2008. C'est le cas, entre autres, de la recherche de la paix avec son corollaire - la restauration de l'autorité de l'Etat - dans les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu. Et, accessoirement, dans l'Ituri (Province Orientale) qui a heureusement commencé à se stabiliser. La sécurité, on s'en rend compte, s'est donc invitée en priorité dans le programme d'action du gouvernement à la veille de l'année 2008.
La prochaine Conférence sur la paix, dont les travaux préparatoires ont débuté le 26 décembre à Goma, sera un test grandeur nature pour jauger de la capacité tant du gouvernement que des acteurs politiques locaux à ?uvrer en faveur de la paix véritable, et de la réconciliation sincère entre communautés des Kivu. Le gouvernement devra, en particulier, prouver son habileté à résoudre une fois pour toutes la récurrente question des rebelles hutus rwandais (FDLR), qui bénéficient de la sympathie de Kinshasa depuis les années Mobutu. En le faisant, il trouvera à se dédouaner en coopérant avec la communauté internationale. Un défi majeur.
5 chantiers : un flou artistique
Autre défi, la concrétisation des «5 chantiers du président». Les populations ayant trop attendu des politiciens, les discours et les promesses les ont saturées au point qu'elles ne sont plus disposées à réécouter la rengaine. Les «5 chantiers» leur ont été annoncés. Il faut passer à leur matérialisation.
Le malheur du gouvernement est de n'avoir pas donné des détails qui s'imposaient, notamment l'échéance de la faisabilité des chantiers, le budget y relatif, l'aire géographique d'exécution, etc. A écouter les récriminations des citoyens, «les 5 chantiers» ont tout l'air «d'un fourre-tout entretenu avec un flou artistique sophistiqué».
A côté des «5 chantiers», la décentralisation ne constitue pas moins une épine dans le pied du gouvernement central. Point n'est besoin de rappeler la passion que le sujet a déchaînée au Parlement et dans les Assemblées provinciales. La clef de voûte de l'agitation demeure la retenue à la source, selon la Constitution, des 40% des recettes à caractère national.
Il est à espérer que l'Exécutif national, avec l'appui des deux chambres du Parlement, donnera satisfaction aux provinces dès la promulgation du budget de l'Etat pour 2008. C'est le lieu de faire observer que les revendications des fonctionnaires et agents de l'Etat attendent, elles aussi, la réponse à travers ledit budget. Le gouvernement sera-t-il en mesure de faire face à ses engagements ? Rien n'est moins sûr.
Il est tout aussi prématuré d'attribuer une quelconque performance au gouvernement, qui lui permettrait, l'année prochaine, de placer la RDC en bonne position pour accéder aux facilités d'allègement de la dette accordées aux PPTE (pays pauvres très endettés) par les institutions de Bretton Woods.
2008 : surenchères politiques
Dans un passé récent, par trois fois, le gouvernement n'a pu convaincre les partenaires sur sa volonté à gérer dans l'orthodoxie le cadre macro-économique convenu. Ce qui a différé à trois reprises l'exécution du Programme économique du gouvernement (PEG). D'autres défis attendent le gouvernement. Il s'agit des réformes annoncées et touchant aux secteurs des entreprises publiques, du système judiciaire et de la Fonction publique. Des observateurs ne manquent pas de relever un paradoxe. Avant même la publication du rapport sur la réforme ainsi que la promulgation de la loi sur les entreprises publiques, le gouvernement s'est déjà précipité à confier la gestion de la SNCC (Société nationale des chemins de fer du Congo) et de l'Onatra (Office national des transports) respectivement à des groupes belge et espagnol. Le cadre juridique ne posera-t-il pas problème ?
Quoi qu'il en soit, l'année 2008 s'ouvre sur de vrais chantiers, les 5 qui font actuellement l'objet de la publicité et les «urgents» qui s'invitent à l'agenda. 2008 marquera, enfin, un tournant car elle verra l'organisation des élections locales, avec ce que cela représente d'enjeux en termes de surenchères politiques. Et de discours démagogiques. Loin de là, le pragmatisme aurait fait l'affaire de tous, sans couleurs politiques.