Vendredi à Goma. Les participants à la Conférence sur la paix, la sécurité et le développement du Nord et du Sud-Kivu ont assisté à une séance pleine d'émotions. Toutes les ethnies représentées ont décidé de laver leur linge sale en famille. En se disant des vérités sans tabous afin d'éclairer les décisions à prendre avant la clôture.
Cette méthodologie a, en conséquence, favorisé, pour la première fois, l'éclatement des questions de fond. Celles qui font que l'extrémisme, la négation de l'autre et, finalement, les guerres ponctuent la vie des populations de ces deux provinces. Avec les conséquences politiques, sécuritaires et économiques que l'on déplore dans la sous-région des Grands lacs.
Si elles ont reconnu un développement déséquilibré des unes par rapport aux autres, les communautés ethniques des Kivu n'en ont pas moins rendu les politiciens locaux responsables des tensions récurrentes dans les Kivu. Pour preuve, à Goma, ce n'étaient pas seulement les Banyamulenge qui ont focalisé les attaques des autres communautés. Il y a eu aussi, fait nouveau, les Nande.
De ce point de vue, la communauté tutsie peut difficilement justifier sa soi-disant exclusion. A Goma, il a été démontré qu'elle, au moins, a placé des cadres tant dans les institutions politiques que dans la haute hiérarchie militaire. Autre cible de frustration : les Nande, accusés à la Conférence d'être envahissants, dans la mesure où, déjà riches opérateurs économiques, ils accapareraient en outre divers postes politiques.
L'évocation des questions de fond débouche ainsi sur un sentiment de marginalisation dont souffre et se plaint - paradoxalement - chacun des groupes ethniques des Kivu. Les Hutus, par exemple, décrient l'injustice, la discrimination, l'intolérance et l'exclusion dont ils sont l'objet de la part de leurs co-régionnaires. Ils en veulent aux Nande, et ils l'ont fait savoir hier vendredi. Les Mbuti (ou pygmées) ont, eux aussi, fait valoir leurs revendications. (Voir le reportage ci-dessous).
Les récriminations des ethnies contre d'autres constituent, de notre avis, la partie visible de l'iceberg. Illustration : les leaders de ces communautés de base n'ont pas hésité à dénoncer la passivité mais aussi la responsabilité de la Communauté internationale dans les malheurs qui endeuillent périodiquement les Kivu, au-delà la République démocratique du Congo.
Sans désigner les pays, les délégués des groupes ethniques ont exhorté ladite Communauté internationale à imaginer des mécanismes susceptibles de favoriser le rapatriement des forces négatives, essentiellement les rebelles rwandais et ougandais.
Décidément, l'audition des déclarations générales des communautés de base a donné un coup de fouet à la Conférence sur la paix et la sécurité dans l'Est de la RDC. Pourvu que la franchise du vendredi continue à planer sur les travaux de la semaine prochaine.