NAIROBI, le 9 mars (IRIN) - Dans son nouveau rapport publié lundi dernier, l'organisation non-gouvernementale (ONG) Human Rights Watch (HRW) a exhorté le gouvernement de la République démocratique du Congo (RDC) et les bailleurs internationaux à prendre des mesures urgentes pour réformer le système judiciaire du pays et s'assurer que justice soit rendue aux victimes de violences sexuelles.
«La violence sexuelle a brisé la vie de dizaines de milliers de femmes au Congo, mais moins d'une douzaine de victimes ont vu leurs agresseurs traduits en justice», a déclaré Alison Des Forges, conseillère principale à la Division Afrique de Human Rights Watch, dans le rapport publié la veille du 8 mars, journée internationale de la femme.
«Le gouvernement congolais doit réformer son système judiciaire pour poursuivre les auteurs viols commis durant le conflit», a-t-elle dit. «L'aide de bailleurs de fonds internationaux tels que l'Union européenne est essentiel pour mener à bien cette action».
Le rapport de HRW, intitulé «Seeking Justice : Prosecution of Sexual Violence in Congo War - En quête de justice : poursuivre les auteurs de violences sexuelles commises pendant la guerre au Congo» explique pourquoi le gouvernement congolais n'a pas pris les mesures appropriées pour poursuivre les responsables de viol durant le conflit.
Selon le rapport, malgré un accord de paix et un processus de transition qui a démarré en RDC en 2003, les soldats de l'armée nationale et les groupes armés continuent de perpétrer des violences sexuelles dans les provinces orientales du pays, ou au Nord et Sud Kivu et dans la Province Orientale du Nord-Est.
En 1998, un conflit armé a opposé les différentes composantes du gouvernement de coalition, des pays voisins et des factions rebelles. Depuis, les combattants de toutes les parties impliquées dans le conflit ont fait subir des violences sexuelles à des dizaines de milliers de femmes et de jeunes filles, mais aussi à des hommes et des garçons, explique le rapport de HRW.
Un nombre croissant de victimes de violences sexuelles réclament justice, indique HRW.
La cour pénale internationale pourra engager des poursuites contre certains auteurs d'abus sexuels, mais la plupart des responsables de ces crimes devront être jugés devant des tribunaux congolais.
Mais le système judiciaire congolais est complètement désorganisé.
«Généralement, les juges et les procureurs ne considèrent pas la violence sexuelle comme un délit grave», explique HRW. «Les officiers supérieurs de l'armée n'ont pas à répondre des crimes commis par les combattants qui sont sous leurs ordres».
Les quelque procès pour viol qui ont eu lieu ont fréquemment abouti à des violations des droits des accusés et des victimes.
Selon HRW, les lois nationales actuelles sur le viol et les crimes de guerre sont inadaptées et incompatibles avec les exigences du droit international humanitaire et des droits de l'homme», a déclaré HRW.
Il convient d'apporter une assistance médicale et psychologique aux femmes et filles victimes de violence sexuelle, note le rapport. Ce rapport analyse le dispositif d'urgence mis en place pour prendre en charge ces viols généralisés et exhorte les autorités à améliorer les services de santé destinés aux victimes, notamment celles affectées par le VIH/SIDA.
Entre temps, l'Onu a exigé du gouvernement congolais qu'il maintienne en détention les chefs de milice arrêtés dans la région orientale.
«Ces personnes ont été placées en maison d'arrêt », a déclaré Fred Eckhard, le porte-parole de l'Onu. «Certains semblent même se déplacer librement, alors qu'ils devraient être coupés de tout contact avec l'extérieur».
Dans une déclaration du président du Conseil de sécurité de l'Onu, Ronaldo Mota Sardenberg, les 15 membres du Conseil ont accusé le Front nationaliste intégrationniste (FNI) d'être le responsable de l'embuscade et de l'assassinat des Casques bleus de l'Onu le 25 février.
Le Conseil a accusé notamment le président du FNI, Floribert Ndjabu, et l'ancien commandant du FNI, Goda Supka. Les deux hommes ont été arrêtés avec Germain Katanga des Forces de résistance patriotique en Ituri.
«La mission exige du gouvernement qu'il procède à l'arrestation effective de ces personnes et qu'il les traduisent en justice», a déclaré Eckhard.