L'article 77 de la Constitution stipule : « Le Président de la République adresse des messages à la Nation. Il communique avec les chambres du Parlement par des messages qu'il lit ou fait lire et qui ne donnent lieu à aucun débat. Il prononce, une fois l'an, devant l' Assemblée nationale et le Sénat réunis en Congrès, un discours sur l' état de la Nation ». Le Congrès est devenu une réalité depuis le mois d'octobre avec l'adoption de son règlement intérieur .
Le chef de l'Etat obéit tout simplement à une disposition constitutionnelle. Mais le choix de cette journée du 6 décembre coïncide également avec la date anniversaire de son investiture en qualité de président de la République. Le 6 décembre, il aura totalisé un an au terme du second tour de l'élection présidentielle du 29 octobre 2006.
Mais que va dire le chef de l'Etat ? C'est la grande interrogation.
Conformément à l'article 114 de la Constitution, l'Assemblée nationale et le Sénat s'étaient réunis pour se doter du Règlement intérieur du Congrès. Chose faite. Le Congrès est désormais une réalité. Aussi, en vertu de l'article 77, alinéa 3, le président de la République est appelé à prononcer un discours sur l'état de la Nation. Le Congrès se réunit sur les matières portant révision constitutionnelle, proclamation de l' Etat d'urgence, discours sur l'état de la Nation - comme c'est le cas maintenant- et désignation de trois membres de la Cour constitutionnelle.
Aussi, le chef de l'Etat a-t-il choisi la date du 6 décembre pour s'acquitter de cette obligation constitutionnelle. Une date pas comme les autres dans la mesure où elle marque également un an d'exercice des fonctions présidentielles après la prestation de serment constitutionnel de Joseph Kabila Kabange, en sa qualité de président de la République issu des élections.
Evidemment, la question fondamentale est celle de savoir de quoi le président de la République va parler. Quel est l'état exact de la Nation ? Dressera-t-il un bilan d'une année de son entrée en fonction ? Autant d'interrogations pertinentes.
LE DISCOURS DU 6 DECEMBRE 2006 : LA FIN DE LA RECREATION
Dans son discours d'investiture, le chef de l'Etat s'était empressé de souligner que son rôle dans la nouvelle configuration est de « conforter la refondation de l'Etat et de susciter une révolution profonde de mentalité ». Il avait promis de veiller au maintien de l'unité et de la cohésion nationales retrouvées. Aussi, devrait-il s'inscrire « résolument dans une politique de régénération et de mobilisation des énergies, visant à impliquer tous les Congolais dans l'exaltante tâche de construction de notre devenir collectif ». Et d'enchaîner : « Je me permets de visualiser ce Congo de demain et vous demande de partager avec moi ce regard. Je vois un Congo où chaque jour, le peuple se remet au travail, renversant les paramètres de la pauvreté en chantier de prospérité ». Il s'agira donc, avait dit le chef de l'Etat, d'engager les travaux de réhabilitation des infrastructures des voies de communication ainsi que les projets agricoles de grande envergure, la réforme du système éducatif, des soins de santé, l'accès à l'eau potable, la lutte contre la pauvreté, l'injustice, etc.
Cependant, le chef de l'Etat avait ajouté que l'on ne peut atteindre cette ambition qu'à la seule condition d'un changement plus profond et substantiel dans notre perception de l'action publique. « Pour cela, avec l'accord de tous, j'annonce aujourd'hui, la fin de la récréation afin que le peuple puisse se consacrer entièrement au travail et ce, dans la paix et la tranquillité. Pour les objectifs de paix et de consolidation de la Nation, je consacrerai toute mon énergie à lutter contre l'intolérance et l'exclusion qui ne font pas partie de nos moeurs et coutumes mais qui sont souvent les germes des conflits. Il en est de même de la lutte contre l' impunité et l' immoralité politiques qui sont malheureusement enracinées dans le sol politique congolais ».
De ce fait, le chef de l'Etat avait placé son mandat sur la trilogie suivante : Bonne gouvernance, Démocratie et respect des droits de l'homme, qualifiés par lui comme les « piliers principaux de la gestion moderne de l' Etat et de la coopération entre les Nations ».
Aussi, s'était-il empressé de dénoncer un fléau qui est à la base du ralentissement total de notre développement : « Je veux parler de la corruption. La lutte contre la corruption sera également un des segments prioritaires de mon mandat. Sous mon impulsion, un travail rigoureux de réforme de cette Administration doit s'effectuer en même temps que le renforcement des capacités institutionnelles de l'Etat et des acteurs non étatiques pour justement s'attaquer aux causes profondes de la mauvaise gouvernance ».
C'est alors qu'il est arrivé à parler de l'Opposition politique : « C'est pourquoi, je réaffirme ici le statut constitutionnel de l'Opposition politique qui doit jouer son rôle de contrepoids institutionnel, et j'ai foi en l'attitude responsable qu'elle affichera. J'invite également tous les leaders d'opinion à jouer pleinement leur rôle quant à la formation civique et à la conscientisation de la population aux valeurs démocratiques et de paix. En ce qui concerne la sécurité de l'Etat, je rassure les Congolaises et les Congolais de ma ferme volonté d'éradiquer toute forme d'insécurité et de terrorisme urbain. Ce qui se passe actuellement à l'Est du pays, avec les bandes armées qui n'ont pas encore compris que ce temps est révolu, sera ma préoccupation principale ».
Evidemment, le chef de l'Etat ne pouvait que déboucher sur le développement économique : « Les efforts pour l'assainissement du cadre macro-économique financier et monétaire doivent être rigoureusement poursuivis pour que la relance économique qu'attend le Peuple congolais ne demeure pas le fait des statistiques et des chiffres, mais qu'elle se concrétise par la création d'emplois, dans le panier de la ménagère et l'assiette de l' huissier. A cet effet, les synergies positives entre les secteurs public et privé doit être encouragée ». Il a terminé son discours par le volet diplomatique en rappelant la position géostratégique de la RDC au coeur de l'Afrique. Une position qui lui permettra de reprendre sa place pour jouer le rôle que l'Afrique et le monde attendent d'elle. « Raison pour laquelle nous devons inaugurer maintenant une diplomatie de développement, en lieu et place d'une diplomatie de simple représentation », avait-il dit.
CONFERENCE DE PRESSE DU 13 SEPTEMBRE : LES GRANDS TRAVAUX AVANT FIN 2007
Autre circonstance à travers laquelle le chef de l'Etat s'est adressé à la Nation, c'est le point de presse du 13 septembre 2007. Plusieurs points ont été évoqués au cours de cette rencontre avec la presse. Notamment le cas Bemba qui, selon le chef de l'Etat, concerne le Sénat et la Justice. Mais la presse avait voulu savoir ce qui a été déjà réalisé depuis son investiture. Le président de la République avait répondu qu'il y avait les « Cinq chantiers » qui constituent désormais un vaste programme adopté part le gouvernement. Il avait précisé qu'il faut beaucoup de moyens chiffrés en termes de milliards de dollars américains avant de souligner et de rassurer « avoir trouvé des moyens avec un montage financier ». Et de renchérir : « Les Cinq chantiers, ce n'est pas du tout une illusion, c'est un programme qui nécessite beaucoup de moyens. Avant 2007, on va commencer la construction de la route Bukavu - Kavumu, poser la pierre au niveau de la route Kasumbalesa - Lubumbashi, démarrer les travaux de l' autoroute Aéroport de N'Djili- Centre-ville à Kinshasa dont les études de faisabilité sont terminées », avait annoncé le chef de l'Etat qui a précisé en outre que « D'ici 2010 ou 2011, on va connecter le pays de l'Est à l' Ouest, du Nord au Sud, si pas la totalité mais au moins la moitié du réseau ». Il avait également saisi cette opportunité pour annoncer une série d'actions à mener sur le barrage de Katende en vue de la fourniture de l'énergie. Il s'était attardé également, au cours de ce point de presse sur l'application du Barème de Mbudi avec le paiement du premier palier avant d'affirmer que sa détermination que le Congo sera modernisé et que la mise en place dans les entreprises publiques devrait intervenir au plus tard avant la fin du mois de septembre 2007.
L'ETAT D LA NATION : LE BILAN
Ce rappel permet d'avoir une idée des points sur lesquels le chef de l'Etat aura à s'appesantir. Il ne manquera pas de relever ce qui a été fait et ce qui ne l'a pas encore été. Donner les raisons des travaux non amorcés.
La sécurité accaparera certainement une bonne partie de son discours avec la poursuite des combats au Nord-Kivu. Il évoquera incontestablement les Accords de Nairobi et de Ngurdoto (Arusha) avec le Rwanda et l'Ouganda. Malgré trous ces accords, les pays voisins n'ont jamais cessé leur soutien aux groupes armés. En plus, il s'attardera sur les Interahamwe. L'aide insuffisante de la Communauté internationale a bloqué ce dossier. Y a-t-il duplicité pour affaiblir la RDC, démoraliser les FARDC ? La question reste posée. Probablement que le chef de l'Etat pourrait saisir cette opportunité pour décréter « l'Etat d'urgence » conformément à la Constitution et face à cette menace contre la RDC.
Sûr qu' il ouvrira aussi un chapitre sur la pétition portant révision de la Constitution. L'eau a beaucoup coulé sur le pont à cause de cette question et son point de vue est très attendu.
Au plan économique, le président de la République va rassurer incontestablement les partenaires traditionnels. Parachever ce qui a été récemment fait à Paris lors de la réunion du Groupe Consultatif des bailleurs de fonds de la RDC. Les rassurer sur l'accord signé avec la Chine. D'ailleurs, les copies de cet accord ont été remises au FMI et à la Banque mondiale sur insistance des bailleurs de fonds. Preuve manifeste qu'il n'y a rien à cacher et que la RDC ne recherche qu'à créer de synergies pour accélérer son développement. L'on s'attend aussi à ce que le chef de l'Etat dégage les perspectives d'avenir de manière à rassurer les uns et les autres. Un grand rendez-vous attendu avec beaucoup d'impatience.