*Nkunda neutralisé, des villes, territoires et localités récupérées, des barrières sur les routes de desserte agricole levées, des milliers des déplacés de guerre retrouvent leurs lits et cruches au lieu d’errer au bas de montagnes où ils étaient systématiquement livrés à des morsures des serpents et aux intempéries de tous ordres. Finalement, Joseph Kabila, en négociant directement avec le Rwanda, en vertu d’une résolution de l’Assemblée Nationale et de sa foi en la paix, gage du développement, récolte ainsi ses premiers fruits. Sa stratégie paie, en dépit du scepticisme des uns et autres, sur l’avenir de ces opérations militaires conjointes. Grâce à ses armes, pieds et poings, il s’escrimait à échapper, le jeudi, dans la soirée, à la furie de la coalition des forces armées rwando-congolaises lorsque sa cavale s’est essoufflée. Laurent Nkunda Mihigo, sérieusement scandalisé par la défection de ses principaux officiers militaires et compagnons de lutte constellés, depuis quelques années, au sein du Congrès National pour la Défense du Peuple, a désespérément tenté une résistance, avant qu’il ne prenne la poudre d’escampette. L’homme avait une double mise : trois bataillons et son dieu, pour fabriquer un miracle. Tout s’est passé aux abords de Bunagana, son fief du Rutshuru, où les deux armées engagées aux opérations conjointes de traque contre les Fdlr, ont dû camper, durant plusieurs heures, pour lui imposer la défaite cuisante. Mais, à l’impossible, dit-on, nul n’est tenu. Devant l’imminence d’une fin tragique, Nkunda n’avait de salut que dans la fuite, vers le Rwanda où il sera rattrapé, des heures plus tard, à Gisenyi, ville voisine à Goma, capitale du Nord-Kivu. Des sources croisées ont laissé croire qu’il aurait été placé en résidence surveillée, sur place à Gisenyi. D’autres encore ont même avancé qu’il serait détenu dans un des camps militaires rwandais. D’autres, enfin, ont dit, hier soir, que Laurent Nkunda serait gardé dans un lieu tenu jusqu’ici secret. Quoi qu’il en soit, l’essentiel reste cependant la confirmation de cette arrestation par John Numbi, l’Inspecteur Général de la Police Nationale Congolaise qui, à l’aube de ce vendredi 23 janvier, l’annonçait en ces termes : « L’Etat-Major conjoint Fardc (armée congolaise) et éléments RDF (armée rwandaise) informe l’opinion publique de l’arrestation du général déchu Laurent Nkunda ce jeudi à 22H30’ en cavale sur le territoire rwandais, après avoir opposé une brève résistance à nos militaires à Bunagana ». Ce communiqué, si laconique soit-il, offre une certitude : l’arrestation de Laurent Nkunda. Et maintenant, que va-t-il se passer ? Toute la question est là. Dans tous les salons ouatés, c’est cette interrogation qui s’est transformée en véritable exercice de mathématique. Dans les analyses, des équations à plusieurs inconnus ont vite fait d’ôter le sommeil aux patriotes. Chacun voulant, naturellement, en savoir un peu plus, sur la suite du feuilleton. Nkunda aux arrêts, c’est bien. Mais, après ? La question demeure entière. Et, avec elle, tout son mystère sur le contenu de l’accord conclu le 5 décembre 2008 entre le Rwanda et la RD. Congo. Dans la tête des congolais, une demande immanente réclame l’extradition de Laurent Nkunda au Congo, pour un jugement public. D’autres exigeraient aussi qu’il soit transféré à la Haye, à la Cour Pénale Internationale. Nombreux ont peut-être oublié, dans ces pertes en conjectures, que Kinshasa était engagé avec les hommes de Laurent Nkunda, à Nairobi, pour des négociations directes. Deux rounds sont passés. Un autre, le dernier, aux dires d’Obasanjo, était renvoyé à ce dimanche 25 janvier 2009. Des pourparlers qui culminaient, certes, vers une paix négociée. Une autre constance, reste sans conteste, cette préoccupation due aux séductions habituelles du Rwanda auxquelles Kinshasa est appelé à la vigilance. Le pays de Paul Kagame n’est-il pas capable d’autoriser l’arrestation de Laurent Nkunda, pour détourner l’attention des congolais sur ce qu’il se préparerait à puiser à l’Est ? La confiance n’exclut pas le contrôle.