Par Kemal Salïk son porte-parole, la Mission d'observation des Nations Unies en République démocratique du Congo (MONUC) vient de jeter un pavé dans la mare en affirmant, dans son point de presse hebdomadaire, que les éléments du CNDP du général dissident Laurent Nkunda ont tué au moins 30 civils à Kalonge et dans les villages environnants entre le 16 et le 20 janvier 2008. De quoi donner à la justice internationale l'occasion de se faire mettre en branle la machine répressive de La Haye !
« Des éléments de preuve indiquent (…) que, des éléments du CNDP auraient tué au moins trente civils à Kalonge et dans les villages des alentours entre le 16 et le 20 janvier 2008 ». Cette déclaration faite mercredi par Kemal Saïki, le porte-parole de la Monuc, au cours d’un point presse à Kinshasa, se révèle un véritable pavé dans la marre.
En janvier, les autorités locales avaient affirmé à l’AFP qu’au total, une quarantaine de villageois avaient été tués par les éléments du CNDP près des localités de Nyamitaba et Kalonge, situées à plus de 60 km au Nord-Ouest de la capitale provinciale Goma. « Les éléments du CNDP auraient commis ces actes, apparemment prémédités, à titre de représailles contre la population civile », à laquelle ils reprochaient de s’être « refugiée dans une zone contrôlée par le Pareco (Patriotes résistants congolais), un groupe d’auto-défense locale Maï-Maï, très hostile au CNDP, a poursuivi M. Saïki.
A l’époque, CNDP et Pareco s’étaient mutuellement accusés d’avoir massacré des civils, évoquant des bilans allant de 20 à plus de 30 tués. Le chef de poste de Nyamitaba (administrateur civil), Emmanuel Munyamariba, avait affirmé à l’AFP que le CNDP pourchassait les villageois jusque « dans les champs et dans les maisons isolées dans la brousse » pour les abattre.
Il avait affirmé que 31 personnes avaient été tuées, près de Nyamitaba et 12 autres à Kalonge, des villages proches d’un des bastions de l’ex-général tutsi- congolais Laurent Nkunda dans le Masisi (Nord-Kivu).
Les victimes, très majoritairement hutues, ont été tuées par balles, à coups de machettes et de massues, selon les enquêteurs de l’ONU et des témoins, alors même que se déroulaient des pourparlers en faveur de la paix dans la région. « Nous nous demandons pourquoi le CNDP, qui a envoyé ses délégués à la conférence de paix, est en train de nous tuer ici », avait déclaré M. Munyamariba.
Le temps du reniement a-t-il sonné ?
En fait, cette révélation surprend lorsqu’elle émane de la Monuc qui, jusqu’à un passé récent, passait dans l’imaginaire collectif pour la protectrice de Nkunda. En effet, plus d’une fois que Nkunda est arrivé au bout de rouleau, il a été remis en selle par la même Monuc qui jouait à l’interposition pour freiner l’élan des Fardc. L’attitude ambiguë de la Monuc au front a longtemps fait l’affaire des troupes du Cndp qui ont multiplié des offensives armées en soumettant des localités entières à leur contrôle sous la barbe des forces onusiennes.
Par cette révélation, l’Onu s’est-elle décidée à lâcher Nkunda ? Est-ce la fin d’une époque ou un redéploiement de l’aide onusienne vers un autre chef rebelle ? Des interrogations qui taraudent déjà l’esprit des maints analystes. Surtout que la fameuse révélation survient au lendemain de la signature de l’Acte d’engagement pour une cessation immédiate des hostilités auquel le Cndp est partie- prenante.
En plus du fait que le coup de boutoir plane sur la tête de Laurent Nkunda candidat à l’amnistie. Avec de telles révélations, rien n’est désormais sûr que l’intéressé serait absout des crimes de guerre ou contre l’humanité ou encore, pour un éventuel génocide qu’il aurait commis durant la période ciblée.
Au cas où son implication directe pour ces genres des méfaits pourrait s’avérer, la justice internationale pourrait alors se charger de lui à l’instar d’autres criminels déjà incarcérés. D’où, pour certains observateurs, la révélation onusienne peut se révéler un indice sérieux à prendre en compte dans la recherche de tout élément susceptible de confondre Nkunda qui, à la faveur de l’accord de Goma, passe pour un ange.