Le Comité pour l’annulation de la dette du Tiers-monde (CADTM) a fait observer que l’effacement de la dette de la RDC n’est pas un cadeau des bailleurs des fonds. C’est plutôt, pense-t-il, la reconnaissance d’une « dette odieuse » qui a été imposée depuis des décennies à la RDC. Mais, au-delà de cette réduction de la dette, la RDC doit se mesurer à un nouveau danger : les fonds vautours.
« L’allègement de la dette de la République Démocratique du Congo n’est pas un cadeau offert par les bailleurs des fonds. Le Congo a dû remplir certaines conditions pour y arriver », a déclaré Renaud Vivien, membre du Comité pour l’annulation de la dette du Tiers monde (CADTM) à Radio Okapi, à l’issue de sa mission au Katanga.
Pour Renaud Vivien, les Congolais et les décideurs doivent continuer à se mobiliser pour que cette dette soit complètement annulée, car, ajoute-t-il, elle n’avait pas profité aux populations locales.
Le Comité pour l’annulation de la dette du Tiers-monde (CADTM) est une structure internationale présente dans 29 pays dont la RDC. Son rôle est de mobiliser et sensibiliser les populations et les décideurs des pays endettés pour des actions pouvant conduire à l’annulation de leurs dettes. Il fait aussi un plaidoyer auprès des pays donateurs.
Pour ce comité, la dette extérieure de la RDC est illicite et le Congo était en droit de refuser de la payer, indique Renaud Vivien : « C’est une dette odieuse parce que les créanciers ont prêté, sachant que ces prêts seraient détournés par Mobutu. Il y avait de nombreux rapports, dont le rapport Blumethal, qui mettaient en garde les créanciers sur les détournements systématiques faits par Mobutu. Donc, la RDC n’est pas redevable aujourd’hui de cette dette. Elle doit être annulée, sans condition et totalement ».
L’allégement de cette dette n’est donc pas un motif de satisfaction pour ce comité car un autre danger guette la RDC : les fonds vautours. Il faut des garde-fous pour éviter que les nouveaux investissements destinés à la RDC soient récupérés par ces fonds vautours. Renaud Vivien explique encore : « En Belgique, les parlementaires ont adopté une loi qui dit que de la coopération au développement ne peuvent pas être saisis par les fonds vautours. La RDC n’a pas toujours ce type de loi. Les parlementaires ont vraiment intérêt à adopter cette loi pour bloquer cette action néfaste de ces fonds prédateurs qu’on appelle fonds vautours ».
L’ANNULATION DOIT BENEFICIER AUX POPULATIONS LOCALES
Les Conseil d’administration du FMI et de la Banque mondiale ont confirmé l’atteinte par la RDC du « point d’achèvement » de l’initiative PPTE, l’initiative d’allégement de la dette des pays les plus pauvres et les plus endettés, fait partie la RDC. Cette décision porte sur un allègement de dette de 12,3 milliards Usd, soit plus de 80% de la dette congolaise, ce qui devrait permettre de dégager des fonds additionnels pour le développement de la RDC en réduisant le service annuel de la dette de 920 à 194 millions Usd.
Cependant, cette décision n’aboutit qu’après de multiples reports et plusieurs années de réformes supervisées par les institutions financières internationales. Ainsi, après une restructuration de la dette congolaise opérée dès 2002, la RDC avait entamé le parcours de l’initiative PPTE en espérant bénéficier d’un allégement de sa dette dès 2006.
Mais c’était sans compter avec de nombreuses conditions liées à ce « point d’achèvement» : d’un taux d’inflation trop élevé au contrat chinois jugé excessif, en passant par la révision contestée des contrats miniers, comme celui de la firme canadienne First Quantum, des justifications n’ont pas manqué pour annoncer un report de l’allégement de dette prévu…
C’est finalement grâce à la signature d’un nouveau programme triennal avec le FMI et le respect des sept (7) critères définis dans ce cadre que la RDC a enfin atteint le « point d’achèvement ».
Par ailleurs, la RDC continuera d’assumer une partie de sa dette dont la viabilité à terme n’est pas assurée. En effet, une part de la dette annulée n’était de toute façon pas payée, du fait que la RDC n’avait pas les moyens d’assumer toutes ses dettes. L’impact sur le financement du développement congolais risque donc d’être plus limité que prévu.
Pourtant, la dette congolaise, essentiellement issue de la dictature de Mobutu, était une dette « odieuse » selon le droit international, c’est-à-dire contractée par un régime non démocratique, sans bénéfice pour la population locale et en connaissance de cause des créanciers. Cette dette aurait donc dû être décrétée nulle et non avenue, comme ce fut encore le cas récemment avec la dette irakienne, mais les créanciers ne l’ont pas entendue de la même oreille.
Cette opportunité ayant manqué, il restait désormais à s’assurer, d’une part, que l’annulation de la dette congolaise bénéficie aux populations locales et, d’autre part, que le pays n’entame pas à nouveau un cycle d’endettement insoutenable. Cela implique de mettre en place un audit permanent de la dette congolaise et d’adopter les principes de la Charte pour un financement responsable définie par Eurodad, afin d’éviter la reconstitution de dettes illégitimes et d’un nouveau cycle d’endettement insoutenable.
Le but étant de s’assurer que les nouveaux prêts qui surviendront à l’avenir soient opérés de manière soutenable. Cela implique ensuite de se prémunir contre les fonds vautours, ces fonds qui achètent avec décote de vieilles dettes sur le marché secondaire en vue d’attaquer en justice le pays débiteur lorsqu’il retrouve des marges de manœuvre financières. La RDC est en effet régulièrement attaqué par ces prédateurs financiers.
C’est pourquoi les deux coupoles des Ong belges, le CNCD-11.11.11 et 11.11.11-KVNZB, demandent, au-delà de l’annulation de la dette congolaise, le démantèlement des fonds vautours et la mise en place de politiques de financement responsable garantissant durablement le financement du développement de la population congolaise.