L'on s'approche vers la fin du feuilleton « FDLR - Nkunda ». Du moins au regard du dernier compromis de Nairobi intervenu entre la République démocratique du Congo et le Rwanda. Le mérite de cette rencontre tenue à Nairobi, en marge de la réunion du Comité inter-régional ministériel de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs, est d'avoir réuni les délégués de la RDC, du Rwanda, de l'Onu, des Etats-Unis, de l' Union européenne et de l'Union africaine. Tous sont d'accord sur l'option militaire pour neutraliser les FDLR.. Mais signer un accord, c'est une chose. Le concrétiser, c'est une autre paire de manches. Cette fois sera-t-elle la bonne ?
Antipas Mbusa Nyamwisi, Charles Murigande, respectivement ministre d'Etat congolais en charge des Affaires étrangères et à la Coopération internationale, ministre rwandais des Affaires étrangères, se sont mis d'accord à Nairobi « sur une approche commune pour mettre fin à la menace pour la paix et la stabilité des deux pays et de la région des Grands Lacs ». Ce compromis est intervenu en marge de la réunion du Comité inter-régional ministériel de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs. Réunion qui s'est tenue du 7 au 9 novembre à Nairobi, au Kenya.( Voir texte en page 3).
Toutefois, on doit ce résultat à l'action diplomatique menée ces derniers temps dans la région des Grands Lacs par les Etats-Unis, l'Onu, l'Union européenne et l'Union africaine. Ainsi, à titre de témoins, les personnalités suivantes ont apposé leur signature au bas de ce document : Haile Menkerios, secrétaire général adjoint de l'Onu pour les affaires politiques, envoyé spécial du secrétaire général de l'Onu pour la RDC, Roeland van de Geer, envoyé spécial de l'Union européenne pour les Grands Lacs, Timothy Shorley, Conseiller spécial en résolution des Conflits de l'Assistante du Secrétaire d'Etat aux Affaires africaines, envoyé spécial du président américain, George W. Bush
Au terme de cette réunion de Nairobi, « les deux pays réaffirment leur engagement à respecter et renforcer mutuellement leur souveraineté et à coopérer pour la mise en ?uvre d'une approche commune afin de démanteler les ex-Far/Interahamwe comme organisation génocidaire et militaire opérant sur le territoire de la RDC ; les deux pays s'engagent pleinement à empêcher tout soutien direct ou indirect politique, matériel ou humain à tout groupe armé national ou étranger opérant en RDC ; les deux pays s'engagent à échanger toute information pertinente et à traiter les questions d'intérêt commun par le biais des mécanismes existants de vérification conjoint (Joint Verification Mécanism JVM) et la Commission Tripartite Plus ; les deux pays vont immédiatement poster les membres du JVT à Goma et Gisenyi, ainsi qu'à Bukavu et Cyangugu ; les deux pays s'engagent à s'abstenir de toute propagande négative l'un envers l' autre ».
En ce qui concerne spécialement la République démocratique du Congo, elle doit « préparer pour le 1er décembre 2007, un plan détaillé pour désarmer les ex-Far/Interahamwe et éliminer la menace qu'elles constituent. Il sera demandé à la Monuc de fournir un soutien pour la planification et la mise en oeuvre subséquente en accord avec son mandat et ses moyens. Le plan sera communiqué au gouvernement du Rwanda le 1er décembre 2007; lancer d'urgence des opérations militaires pour désarmer les ex-Far/Interahamwe comme organisation génocidaire militaire en RDC. Ces opérations devraient être conduites simultanément avec les opérations de démantèlement des autres groupes illégaux au Nord eu Sud-Kivu. »
De son côté, le Rwanda s'engage à « prendre toutes les mesures nécessaires pour sécuriser sa frontière et empêcher l'entrée ou la sortie des membres de tout groupe armé, en particulier de celui du chef de milice dissident Nkunda, et d'empêcher que toute forme de soutien - militaire, matériel ou humain - soit fourni à aucun groupe armé en RDC ; transmettre au gouvernement de la RDC et à la Monuc, une liste des génocidaires recherchés ( toutes catégories) ; s'abstenir de toute déclaration, de soutien à tout groupe armé en RDC ; encourager par le biais de programmes appropriés les membres des ex-Far/Interahamwe et leurs proches à regagner leur pays et faciliter leur réintégration socio-économique effective ».
PLUS DE POLITIQUE D'AUTRUCHE
Avec cet accord de Nairobi, les choses sont désormais claires. Chaque partie accepte sa part de responsabilité et s'engage à ?uvrer pour la fin de la menace sur la paix, la stabilité dans la région des Grands Lacs. Ceci dit, la RDC devra s'employer à neutraliser les forces négatives présentes sur son territoire. Dans ce cas, tout mettre en ?uvre pour que le plan soit prêt à la date convenue pour ne pas être accusée de retarder l'application de l'accord de Nairobi.
De son côté, le Rwanda devra agir de la même façon à l'endroit de Nkunda. Mais surtout prendre toutes les dispositions susceptibles de permettre la réintégration des réfugiés rwandais. Il revient donc au Rwanda d'assainir son environnement politique pour qu'il n'y ait plus « de réfugiés ».
Aux partenaires extérieurs d'assumer également leur part de responsabilité. Que dire de la Monuc si son mandat n'est pas réajusté ou requalifié en vue de soutenir le plan de la RDC ? Les FARDC sont en pleine restructuration et accusent encore des lacunes dans leur déploiement. Comment rendre leurs opérations militaires efficaces si la Monuc doit continuer à observer ? L'Union européenne n'a jamais apporté la logistique promise à l'Union africaine dans le but de constituer une force africaine qui devrait être déployée à ce propos justement, et venir en aide à la RDC pour « traquer » les forces négatives au Kivu, tel que le recommande l'Accord de Lusaka. Qu'est ce qui a changé maintenant ?
L'Onu, surtout les Etats-Unis et l'Union européenne doivent répondre à cette interrogation pour mettre effectivement fin à la politique d'autruche qui a souvent caractérisé la gestion de cette question précise. Tant qu'elle subsistera, la menace sur la paix, la stabilité de la RDC et du Rwanda, et celle de la région des Grands Lacs, subsistera également. En fait, il s'agit d'une affaire « des enjeux politiques et économiques régionaux et internationaux », mais aussi « de gros sous ». Halte à la naïveté.