Quatre jours auront suffi, pour la Chambre Préliminaire III, d’enregistrer les arguments de l’accusation, de la défense ainsi que de victimes. Les audiences de confirmation des charges se terminent aujourd’hui, à la Haye. Les juges ont soixante jours, pour ressasser tous les aspects du dossier. Bemba devra ainsi rester sur ses gardes jusqu’au 15 mars 2009 pour savoir s’il ira en procès ou non. Ses avocats érigés en bouclier tentent l’ultime miracle, pour faire échec à Luis Moreno Ocampo, le Procureur de la CPI et, à ses colistiers. Mais, si Ange-Félix Patassé, François Bozize et consorts ne sont pas entendus, la vérité ne risque-t-elle pas d’être occultée ? Les dernières manœuvres ont commencé à la Haye. Aujourd’hui, en fin de la journée, c’en est fini avec les audiences de confirmation des charges à l’encontre de JP Bemba, un homme de 46 ans, mesurant 1,90 m, marié à Lilia Texeira, père de famille, leader du Mouvement de Libération du Congo, ex-Vice-Président de Joseph Kabila et candidat malheureux à la présidentielle 2006. En dernière minute, Bemba, homme d’affaires, homme politique de renom, espérait rentrer au pays, après un exil forcé à Faro, au Portugal, pour assumer les fonctions de Porte-parole de l’Opposition congolaise. Sénateur de son état, Bemba compte désormais les jours de sa vie, dans les quatre murs du quartier pénitentiaire de la Haye, au Pays-Bas. Il hume l’air conditionné en lieu et place de l’air pur de Gemena, son fief naturel, à l’Equateur. Après cette première étape, celle de l’arrestation à Bruxelles, le 24 mai 2008, de la transmission à la Cour, environ un mois après, et de l’ouverture d’audiences, le 12 janvier, la procédure de forme arrive à terme. A la prochaine, il sera question de passer à la phase supérieure. Les juges de la Chambre Préliminaire III ont, pour ce faire, soixante jours. De l’examen approfondi de 10.000 pages de pièces étayées dans le dossier à charge de Bemba, par Luis Moreno Ocampo, le Procureur de la CPI, dépendra étroitement la suite du feuilleton, si long soit-il. Les premières projections, s’il faut calculer les jours en bon mathématicien, laisser croire qu’au 15 mars 2009, les trois juges seront fondés à se prononcer si oui ou non, Bemba va en procès. En quatre jours, les parties en cause ont vidé leur sac devant les juges. L’accusation est restée fidèle à ses dépositions initiales. Bemba, selon elle, doit être poursuivi pour cinq chefs de crimes de guerre et de trois chefs de crimes contre l’humanité. L’accusation, dans ses nombreuses interventions, estime que les soldats du Mouvement de Libération du Congo dépêchés, en son temps, en République Centrafricaine, à la demande de Patassé, avaient des instructions de terroriser les populations civiles. Ils avaient, en outre, mission de les traumatiser dans l’intention de les soustraire de toute tentative de ralliement à la rébellion, de François Bozizé. Les avocats érigés en bouclier pour défendre Bemba, ont étalé, avec doigté, leurs arguments. Pour eux, en effet, nul ne peut prétendre accuser Bemba, dans une affaire où il n’était ni dans la chaîne de commandement, ni dans le dispositif logistique arrêté pour faire face à la rébellion. Ses hommes en armes avaient été mis à la disposition de l’Etat-Major de l’armée Centrafricaine, placé sous la férule de Patassé. Les victimes, cinquante-quatre, au total, ont soif de la justice et de la vérité. Elles insistent auprès de la CPI, pour que leurs droits soient reconnus. Mais, au fond, une question revient toutes les lèvres. Peut-on juger et condamner Bemba, en l’absence de Patassé et Bozizé ? Un tel jugement peut-il être rendu sans que la vérité ne soit occultée ? La crédibilité de la Cour est toute dans la manière dont elle dira le droit, dans cette affaire. Tout se jouant ici bas, il va de soi que la justice internationale soit à la hauteur des attentes des uns et autres. Le droit à un procès équitable est et restera un droit légitime. L’honneur aujourd’hui souillé de Bemba, les espoirs des victimes, la justesse des vues du Procureur Luis Moreno Ocampo, ne peuvent valablement trouver des réponses que si, toutes proportions gardées, la CPI met l’église au milieu du village, dit le droit, et offre à chacune des parties, les chances égales.