Les crimes de guerre dont il est question — la conscription et l’enrôlement d’enfants de moins de 15 ans et le fait de les avoir fait participer activement à des hostilités — ont été commis dans le cadre d’un conflit armé interne qui a eu lieu en Ituri (République démocratique du Congo) et a opposé la Force patriotique pour la libération du Congo (FPLC), dirigée par Thomas Lubanga Dyilo, à l’Armée populaire congolaise et à d’autres milices, dont la Force de résistance patriotique en Ituri. Thomas Lubanga Dyilo et les coauteurs des crimes ont convenu d’un plan commun consistant à mettre sur pied une armée dans le but de prendre et conserver le contrôle de l’Ituri, aussi bien politiquement que militairement. Ce plan a eu pour conséquence la conscription et l’enrôlement de garçons et de filles de moins de 15 ans, et leur utilisation pour les faire participer activement à des hostilités.
Thomas Lubanga Dyilo était Président de l’Union des patriotes congolais (UPC), dont il exerçait la direction politique, et commandant en chef de la branche militaire de celle-ci, la FPLC. Il assurait la coordination globale des activités de l’UPC/FPLC et apportait un appui actif aux campagnes de recrutement, par exemple en prononçant des discours devant la population locale et les recrues. En outre, il a personnellement utilisé des enfants de moins de 15 ans comme gardes du corps et voyait régulièrement de tels enfants assurer la garde d’autres membres de l’UPC/FPLC. La Chambre, composée des juges Adrian Fulford (juge président), Elizabeth Odio Benito et René Blattmann, a conclu que les éléments de preuve présentés par le Procureur établissent au-delà de tout doute raisonnable que Thomas Lubanga Dyilo a apporté une contribution essentielle au regard du plan commun.
À la demande de Thomas Lubanga Dyilo et en application de l’article 76-2 du Statut de Rome, la Chambre consacrera une audience distincte à la fixation de la peine. Elle établira également les principes applicables aux réparations en faveur des victimes. La Défense a le droit d’interjeter appel de la déclaration de culpabilité dans un délai de 30 jours suivant la réception de la traduction française du Jugement.
Informations générales
Thomas Lubanga Dyilo, ressortissant de la République démocratique du Congo, a été transféré à La Haye le 17 mars 2006, en exécution d’un mandat d’arrêt délivré par la Chambre préliminaire I. Son procès, le premier devant la CPI, s’est ouvert le 26 janvier 2009, pour s’achever par la présentation des conclusions orales des parties et participants les 25 et 26 août 2011.
En 204 jours d’audience, la Chambre de première instance a rendu 275 décisions et ordonnances écrites, ainsi que 347 décisions orales. Elle a entendu 36 témoins cités à comparaître par le Bureau du Procureur, dont trois experts, 24 témoins cités par la Défense et trois par les représentants légaux des victimes participant à la procédure. La Chambre a quant à elle cité quatre experts à comparaître. En tout, 129 victimes, représentées par deux équipes de représentants légaux et le Bureau du conseil public pour les victimes, ont obtenu le droit de participer au procès. Elles ont été autorisées à présenter des observations et à poser aux témoins des questions spécifiques. L’Accusation a versé 368 pièces au dossier, la Défense 992, et les représentants légaux des victimes 13.
La CPI est la première cour pénale internationale permanente créée en vertu d’un traité pour mettre fin à l’impunité des auteurs des crimes les plus graves touchant la communauté internationale, à savoir les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité, le génocide et le crime d’agression. Jusqu’ici, 15 affaires ont été portées devant elle, dans le cadre de sept situations qui font actuellement l’objet d’enquêtes : les situations en Ouganda, en République démocratique du Congo, en République centrafricaine, au Darfour (Soudan), au Kenya, en Libye et en Côte d’Ivoire. Les juges de la CPI ont délivré 20 mandats d’arrêt (dont deux ont été annulés par suite du décès des suspects) et neuf citations à comparaître. Aujourd’hui, cinq personnes sont en détention sous la garde de la CPI et 11 suspects sont toujours en liberté.