« A ce stade, ces opérations n’ont plus respecté les normes internationales et régionales en la matière. Nos compatriotes subissent des exactions, des extorsions, des tortures et des lynchages de la part de certains éléments de la police et des bandes de jeunes xénophobes de la République du Congo-Brazzaville », souligne le compte-rendu du conseil de ministres lu à la télévision publique par le porte-parole du gouvernement, Lambert Mende.
Le gouvernement congolais fait aussi état de ses ressortissants « en ordre de séjour au Congo-Brazzaville » mais qui ont « décidé de quitter volontairement ce pays pour éviter l’humiliation et des brimades, renonçant de la sorte par contrainte à leurs droits ».
Au sujet du nombre des personnes refoulées, il s’élèverait actuellement à 72 731, selon les chiffres officiels.
« A la date de lundi 5 mai 2014, 71 407 compatriotes ont été expulsés du Congo Brazzaville par le Beach Ngobila à Kinshasa. Certains autres compatriotes ont été expulsés par des postes-frontières hors de Kinshasa notamment 37 dans la province du Bandundu et 231 dans la province du Bas-Congo. Ce qui donne un total de 72 731 personnes refoulées du Congo-Brazzaville », a précisé Lambert Mende.
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« Les expulsions vont encore durer pendant un mois »
L’Organisation internationale pour les migrations (OIM) livre à peu près les mêmes chiffres que le gouvernement de la RDC. Elle évoque 72 000 Congolais de la RDC expulsés du Congo Brazzaville depuis le 26 avril dernier. Cinq mille ressortissants de la RDC sont renvoyés quotidiennement. A en croire l’OIM, trois mille expulsés dont des enfants non accompagnés et des sans-papiers sont actuellement hébergés au centre d’accueil aménagé au stade Cardinal Malula à Kinshasa.
Florian Morier, chargé des projets au bureau de l’OIM en RDC, affirme que les personnes expulsées arrivent à Kinshasa « dans des états de fatigue très avancée parce qu’il faut savoir que ces gens apparemment restent dans des sites de transit au Congo-Brazza durant plusieurs jours avec très peu d’eau et de nourriture ».
« Les agents de la DGM s’occupent rapidement de faire leur enregistrement et ensuite ils les dispatchent dans des navettes vers le stade où leurs familles les accueillent », ajoute-t-il, indiquant que ces expulsions pourraient encore durer un mois.
Florian Morier explique qu’au départ ces expulsions étaient ciblées et ne concernaient que des personnes en situation irrégulière au Congo Brazzaville. Mais que les choses ont évolué.
« Maintenant le phénomène s’est un peu accentué. C’est comme-ci les autorités du Congo-Brazza avaient laissé libre-cours à des actions individuelles. C’est ce qui fait que maintenant beaucoup de personnes quittent le Congo-Brazza sans motif particulier », souligne-t-il.
Par ailleurs, l’OIM se dit prête, avec d’autres agences humanitaires partenaires, à appuyer les efforts du gouvernement dans la prise en charge et l’acheminement des expulsés originaires du Bas-Congo et de l’Équateur, actuellement hébergés au centre d’accueil du stade Cardinal Malula.
Gifle des aînés
La police du Congo Brazzaville mène depuis le mois d’avril l’opération « Mbata ya mikolo » (gifle des aînés, en français). Officiellement, cette opération est destinée à expulser des étrangers en situation irrégulière.
Mais plusieurs témoignages font état d’exactions commises par des policiers qui conduisent cette opération. Les autorités de deux pays avaient annoncé la mise en place d’une commission d’enquête pour vérifier ces allégations.
Selon le député Emmanuel Ramazani Shadari, qui a conduit une délégation parlementaire de Kinshasa en République du Congo, 17 policiers du Congo-Brazzaville ont été radiés de la police, pour avoir commis des dérapages pendant ces expulsions.