Face à "une milice qui avait pour objectif de s'en prendre aux sièges des institutions" et de "contrôler la capitale, il fallait à tout prix rétablir l'ordre dans les plus brefs délais" a déclaré aujourd'hui en conférence de presse le président Joseph Kabila, s'exprimant pour la première fois sur les événements meurtriers qui ont troublé Kinshasa jeudi et vendredi.
"Le problème n'était pas politique, il était militaire et sécuritaire (?) Ce n'est pas par la négociation qu'on assure la sécurité" a-t-il ajouté se référant aux combats qui ont opposé des soldats commis à la garde de l'ex-vice président et ex chef rebelle Jean-Pierre Bemba, réticent à l'idée de se retrouver sous la protection de 12 policiers comme prévu par la loi, à des éléments des Forces armées congolaises (Fardc).
Interviewé hier par Le Monde, le sénateur (élu à Kinshasa) Bemba, chef de l'opposition du nouveau gouvernement issu des élections démocratiques, a refusé de dire où il se trouvait, après s'être réfugié jeudi à l'ambassade d'Afrique du Sud. Sous le coup d'un mandat d'arrêt pour "haute trahison" et "entretien de milices", il a dit au quotidien français : "Kabila veut se débarrasser de moi. Après ce qu'il m'est arrivé, personne n'osera plus parler dans ce pays. (?) Il est incroyable que dans un pays démocratique on utilise les militaires pour intimider un homme politique".
Un nouveau bilan, encore provisoire, communiqué à la MISNA par Caritas développement Congo (qui identifie les victimes dans les hôpitaux de la capitale), 157 personnes, dont 3 enfants, ont été tuées et 150 blessées, militaires, policiers et civils confondus. Caritas est également en train de faire un bilan des dégâts matériels, qui concernent surtout des édifices institutionnels et des bureaux du quartier de La Gombe, et des pillages dans les magasins et les sièges de nombreuses sociétés. L'organisation catholique a reçu des témoignages concernant trois viols commis par les forces armées régulières et de nombreuses extorsions, en plus du fait que la plupart des civils restés bloqués dans les édifices pendant les combats sont traumatisés. Caritas développement Congo a débloqué 49.000 euros destinés à l'achat de vivres et de produits pharmaceutiques de première nécessité.
"Alors qu'ils reprennent lentement leurs activités quotidiennes" dit à la MISNA un journaliste de la radio catholique Radio Elikya, "on sent bien que les habitants de Kinshasa souhaitent surtout que le processus démocratique reparte de là où il était arrivé et que les polémiques autour du brassage (des militaires et ex-combattants, Ndlr) soient réglées une fois pour toutes, de façon à ce que leur sécurité soit assurée". "Le plus gros du processus démocratique a déjà été fait et une nouvelle ère semblait bien engagée pour le Congo" a pris le relais l'abbé Claude Mbu, de la Caritas diocésaine de Kinshasa ; "les violences de Kinshasa ne représentent que des ratés, qui ne parviendront pas à balayer d'un tour de bras tous les efforts mis en ?uvre pendant si longtemps. Personne n'a intérêt à se tirer dessus, ce qui prévaut c'est faire la paix" a conclu l'interlocuteur de la MISNA. (CC/VV)