A l'issue d'une réunion tenue samedi, la Conférence des présidents des différents groupes parlementaires a invité le bureau de l'Assemblée à "entreprendre toutes les actions nécessaires auprès des autorités compétentes afin de sécuriser tous les députés en général et ceux de l'opposition en particulier", condition nécessaire pour qu'ils regagnent le Palais du peuple, rapporte Radio Okapi.
Faisant lecture de la déclaration du bureau de l'Assemblée nationale, son rapporteur Grégoire Katende wa Ndaya Muledi, a dit que le bureau a entendu les groupes de l'Opposition et ceux de la Majorité sur les préoccupations de la sécurité de leurs membres et le risque de détérioration du climat politique dans le pays, constatant l'insécurité dans le pays en général et dans les milieux de l'Opposition en particulier. Cette réunion est intervenue au lendemain de la décision de la coalition de l'Union pour la nation (Un), guidée par le Mouvement de libération du Congo (Mlc) de l'ex-candidat perdant à la présidentielle et sénateur Jean-Pierre Bemba (à la direction de l'opposition) de suspendre sa participation aux travaux de l'Assemblée nationale.
Cette décision avait été prise durant la session plénière de vendredi. De leur côté, les députés membres de l'Union pour la nation attendent des signaux et des mesures de sécurité effectifs avant de revenir à l'Assemblée nationale. C'est l'avis par exemple de Delly Sessanga, 1er vice-président du groupe parlementaire du Mlc : "La participation effective des députés de l'Opposition aux travaux de l'Assemblée implique que des signaux soient lancés à la fois en termes de sécurisation effective des membres de l'Opposition et en termes de dialogue qui avait été initié à la faveur de la déclaration du 24 mars. Il faut que ce dialogue soit poursuivi pour trouver une solution qui réponde à l'intérêt général." Au point où sont les choses, Delly Sessanga considère que l'intérêt général est en train d'être bafoué.
Selon Thomas Luhaka, secrétaire exécutif du Mlc, cité par la radio de la Mission de l'Onu dans le pays, c'est "l'insécurité chaque jour croissante qui règne dans la ville de Kinshasa et dont les députés, sénateurs, membres, cadres et militants de l'opposition politique sont particulièrement victimes" qui empêche la participation aux travaux parlementaires. Dimanche 8 avril, le Mlc avait déjà dénoncé des vexations présumées perpétrées par les forces de sécurité et les gardes présidentielles contre ses membres après les affrontements entre les Forces armées congolaises (Fardc) et les milices de Bemba qui, entre le 22 et le 24 mars dernier, auraient provoqué selon l'Union européenne entre 250 et 600 morts.
Le dernier épisode de violence est survenu dans la nuit entre mercredi et jeudi : des hommes armés ont fait irruption dans l'habitation du député Omer Egbwake, élu dans la province de l'Équateur, fief de Bemba, et pendant plus de 40 minutes il a été "menacé, intimidé et on m'a volé des effets personnels alors que des coups d'arme à feu ont été tirées" a raconté la victime de l'agression. "Par conséquent (?) nous sommes obligés de suspendre sine die et jusqu'à nouvel ordre notre participation aux travaux de l'Assemblée nationale tandis que des conditions de sécurité adéquates n'auront pas été prises" soutient le communiqué lu vendredi au Parlement par Luhaka.
La décision aurait également été prise suite à la manifestation organisée vendredi à Kinshasa par la Ligue des avocats du peuple, une organisation de la société civile proche de l'alliance de la majorité du président Joseph Kabila. Des centaines de personnes auraient manifesté en demandant l'ouverture d'un procès contre l'ex-vice-président de transition Bemba, qui est parti mercredi dernier pour le Portugal avec son épouse et ses cinq enfants, officiellement pour y être soigné.
Mais Luhaka a dénoncé à Radio Okapi le fait que les organisateurs de cette pseudo manifestation auraient donné aux citoyens entre 1.000 et 1.500 francs congolais (entre 1,7 et 2,5 euros) pour qu'ils prennent part à "une mise en scène organisée pour discréditer l'opposition politique et l'exposer à des représailles injustifiées". Jeudi, le procureur général Tshimanga Mukeba avait demandé au président du Sénat de révoquer l'immunité parlementaire de Bemba, car il serait l'"auteur intellectuel des infractions commises par les militaires chargés de sa sécurité" durant les violences de fin mars.