Pourquoi voter ? Pour qui voter ? La double question trouble encore l’électeur congolais à la veille des élections prévues le 28 novembre 2011. Pour éclairer le citoyen sur le profil d’un bon candidat et sur le bien-fondé du vote, l’Eglise catholique en RDC a choisi d’assurer une éducation civique et électorale de la population. La cérémonie solennelle d’ouverture a été lancée le vendredi 23 septembre à Kinshasa par le président de la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO) Mgr Nicolas Djomo.
Cette campagne de sensibilisation et de mobilisation des populations pour les élections crédibles et apaisées a commencé par une formation des formateurs en éduction civique et électorale de Kinshasa. Elle va s’étendre très prochainement à l’ensemble du territoire national. Pour l’Eglise catholique, cette campagne contribuera, à coup sûr, à rendre aux enfants de Dieu leur dignité.
A terme, la CENCO compte fournir environ trente mille (30.000) observateurs de prochains scrutins. Cette annonce intervient juste après celle faite par l’Union européenne qui enverra, elle aussi, 120 observateurs. C’est dire toute l’importance que les partenaires accordent au processus électoral en cours en RDC.
La mission de formation et de sensibilisation est confiée à la commission épiscopale «Justice et Paix» de l’Eglise catholique. Elle cible quasiment toutes les catégories sociales du pays, notamment les hommes de Dieu, les représentants des partis politiques et les acteurs d’ONG et de la Société civile. Car, c’est à eux qu’incombe la lourde tâche de sensibiliser les populations en apportant une ébauche sur la double question : «pourquoi voter ?» et «pour qui voter ?».
«Notre action touche tous les Congolais sans distinction, sans discrimination», a souligné Mgr Nicolas Djomo. L’évêque de Tshumbe a rappelé que la présente initiative répond aux multiples messages d’apaisement lancés par les évêques en vue de l’organisation des élections crédibles et démocratiques. «Je me réjouis aujourd’hui que les messages de la CENCO aient été traduits en programme concret et cohérent de sensibilisation à l’éducation civique pour le bien-être des populations congolaises», s’est félicité le prélat catholique. Il s’ensuit que l’Eglise catholique reste convaincue que les élections ne sont pacifiques que dans la mesure où elles sont crédibles, transparentes et démocratiques.
Avant de déclarer «ouverte» la campagne de sensibilisation, le président de la CENCO a expliqué le bien-fondé de cette action : «Nous faisons l’éveil de la conscience de tout citoyen congolais : ceux qui auront à élire et les élus. Ce que l’on vise c’est l’amélioration des conditions de vie des Congolais. Pour ça, la condition essentielle, c’est la paix. Lorsqu’on a la paix, on donne une chance à la démocratie, à la croissance économique.» C’est donc un appel à la conscience des Congolais qui ont un contrat social qui consiste à faire de ce pays «viable et intéressant pour tout le monde» que lancent les évêques.
La gouvernance détermine le vote
Dressant une sorte de bilan de l’action de l’Eglise de ces dernières années, la secrétaire exécutive de la Commission épiscopale «Justice et Paix», Sœur Marie-Bernard Alima, a indiqué que l’engagement de l’Eglise à l’éducation civique et électorale est une notion permanente et non improvisée. L’Eglise a signé, dernièrement, avec les ministères de la Décentralisation et des Finances un protocole d’accord sur la décentralisation et sur la culture fiscale.
Pour les évêques catholiques, la question des élections est intimement liée à la bonne gouvernance. Ils estiment que les élections ne constituent pas une fin en soi. «Les élections doivent contribuer à l’amélioration des vies des populations», a lancé le président de la CENCO.
Un diagnostic lucide a permis de constater que les causes des crises successives en 50 ans, sont liées au fait que le Congolais n’est pas placé au centre des actions des politiciens. «Il est venu le temps de changer de mentalité, en mettant l’homme au centre de toute action politique». L’Eglise est d’avis qu’il y a d’énormes défis à relever à la base. C’est ce que les évêques appellent «questions de gouvernance». Il s’agit notamment de l’eau, l’électricité, de même que du droit à la santé, à l’éducation, à la justice distributive et équitable. Pour toutes ces questions non résolues, l’Eglise catholique invite la population d’aller voter. «Pour ou contre, il faut voter, car chaque voix compte ; chaque voix coûte».
La problématique ainsi posée de dresser le profil d’un bon candidat, afin que les «brebis galeuses» soient écartées de la course et que tous les pêcheurs en eaux troubles ne reviennent plus appâter les populations qu’ils ont affamées à souhait.
Comment juger un bon candidat ? Les évêques esquissent une ébauche de réponse : «Celui qui inscrit son action politique dans une vision et une pratique du pouvoir politiques conformes aux idéaux de l’indépendance et des sociétés démocratiques». Selon eux, «celui qui considère le pouvoir politique comme un service du bien commun, qui appréhende les responsabilités publiques dans la logique du partage des avantages économiques au bénéfice de la population doit être considéré comme un bon candidat».
Bref, pour l’Eglise catholique, il faut voter pour un candidat soucieux du bien commun, compétent, intègre, honnête ; qui n’est pas un commissionnaire ; dont l’horizon politique dépasse les limites étroites du clan, de la tribu, de la province ; qui n’est pas classé parmi les malfaiteurs du pays. Ce profil, la commission épiscopale «Justice et Paix» l’avait déjà rendu public dans son feuillet «Ensemble pour un Etat de droit», de juillet 2011.