La situation sociale est agitée : grève des médecins, grogne des enseignants, des fonctionnaires et agents de l'Etat. La responsabilité du gouvernement est mise à rude épreuve. Car, au-delà de ces manifestations, c'est son action, sa cohésion et sa crédibilité qui sont en jeu. Malheureusement, rien n'a été dit au cours de la réunion d'hier mercredi du Conseil des ministres. Curieusement, en début de soirée, un protocole d'accord a été signé. Qu'est-ce à dire ? Seraient-ce des fissures au sein du gouvernement, laissant transparaître des signes avant-coureurs de la « guerre des clans » ou l'existence des réseaux parallèles ? Danger.
Le gouvernement s'est réunit hier mercredi. A priori, il devrait se pencher sur la situation préoccupante dans le secteur de la santé avec la grève des médecins qui vient d'entrer dans sa troisième journée. Car, il s'agit d'une situation préoccupante où l'on compte déjà des morts. Hélas !
Silence radio du côté du gouvernement qui s'est contenté d'examiner trois projets d'ordonnance qui n'ont rien à voir avec la situation d'actualité brûlante, confirmant en d'autres termes la thèse de l'insouciance décriée de la part de l'Exécutif. Et pourtant, il s'est agi d'une «réunion extraordinaire». En quoi a-t-elle été extraordinaire ? Serait-ce par le fait qu'elle s'est tenue un mercredi au lieu de vendredi comme de coutume, ou tout simplement, à en croire des rumeurs de plus en plus persistantes, parce que le Premier ministre entamerait la «deuxième phase de ses vacances», cette fois au pays ? Ou alors que certains ministres veulent s'attribuer la paternité de la conclusion d'un accord avec les médecins ?
Certes, selon les éléments d'informations, le gouvernement aurait décidé d'apurer six mois d'arriérés de salaires découlant de la mécanisation de nouveaux médecins. Quant à la prime, sa solution serait tributaire des contraintes budgétaires.
Cependant, le syndicat national des médecins affirme que les deux parties sont loin de parvenir à un accord. C'est ainsi que le protocole d'accord qui devrait être signé mardi au ministère du Budget a été reporté à une date ultérieure, en attendant la décision du gouvernement sur cette question.
Déception. Aucun mot là-dessus dans le compte rendu fait à la presse par le Porte-parole du gouvernement. Mais voilà que qu'un peu plus tard dans la soirée, l'on faisait savoir qu'un accord venait d'intervenir alors que le communiqué de la réunion du gouvernement n'a fait ni allusion à ce cas, ni à la poursuite des négociations. Pourquoi cette omission d'un cas aussi préoccupant dans une gestion d'Etat qui se veut transparente ? Pourquoi ces « communiqués clientélistes » dans une matière aussi grave où il y a déjà mort d'hommes ? A qui veut-on jeter les fleurs si tout le gouvernement n'a pas été associé à ces négociations ?
GOUVERNEMENT DIVISE
Dans ses investigations, Le Potentiel constate que cette grève des médecins est en train de diviser le gouvernement. En effet, il revient que la réunion de mardi au ministère du Budget a réuni, outre le ministre du Budget, ses homologues des Finances et de la Santé. Celle du mercredi 20 août, après ou en marge de la réunion extraordinaire du gouvernement, a regroupé le ministre d'Etat près la présidence de la République, les ministres de la Santé et du Budget. Du côté des médecins, l'on signale la présence du Dr Mbutuku et Dr Mankoy, respectivement secrétaire général du Synamed et président du Conseil national de l'Ordre des Médecins.
Or, dans des circonstances actuelles et de façon classique, le gouvernement, disons le Premier ministre devrait convoquer et présider la réunion du «Cabinet de crise». Empêché, cette rencontre devrait être présidée par le membre du gouvernement qui assure son intérim pour plus d'avancées significatives. Ce qui n'a pas été le cas.
Raison pour laquelle la réunion d'hier mercredi était très attendue dans la mesure où cette question a une portée nationale et tous les membres du gouvernement doivent se sentir concernés au nom de la solidarité et de l'intérêt supérieur de la Nation. Surtout que cette agitation du front social ne se limite pas seulement aux médecins, mais aura des effets d'entraînement sur d'autres secteurs de l'Administration et de la vie nationale. Ce n'est donc pas par groupe de deux ou trois ministres que le gouvernement s'emploiera à examiner différents cas sociaux. Mais, en principe, au sein des commissions ad hoc du gouvernement, d'abord, et au Conseil des ministres au grand complet pour ne pas affecter la cohésion gouvernementale.
DES RESEAUX PARALLELES
En fait, le cas de la gestion de la grève des médecins soulève d'autres interrogations liées à des cas antérieurs et à venir. Une illustration des insuffisances susceptibles de confirmer la thèse de l'absence d'un leadership au sein de l'Exécutif. Tenez.
Outre la réunion présidée mardi et mercredi par le ministre Muzito, en charge du Budget en présence du ministre d'Etat près la présidence de la République, une autre réunion a été également présidée par les ministres d'Etat Mobutu Nzanga et Denis Kalume, en charge de l'Agriculture et de l'Intérieur avant que le gouvernement ne se réunisse en réunion extraordinaire hier mercredi sans évoquer ce cas d'espèce.
Donc, une réunion extraordinaire sans rien d'extraordinaire pendant qu'il y a mort d'hommes dans les hôpitaux de la République. Pourquoi toutes ces initiatives parallèles alors qu'une réunion d'un «Cabinet de crise» aurait permis à tout le monde d'éviter le gaspillage des efforts ?
Quoique l'on dise, les observateurs de la politique congolaise notent l'émergence des groupes dans les institutions nationales. Apparaissent alors des « pro-chinois », des « pro-indiens», des «pro-sudafricains », des « pro-belges », des « pro-français », des «pro-américains», des «pro-allemands», des « pro-arabes », et nous en passons.
Cette diversité pouvait être assimilée à la dynamique de notre coopération. Malheureusement, elle institue plutôt des « groupuscules » qui gardent secrètement et jalousement, pour des raisons faciles à deviner, certains dossiers. Et lorsqu'intervient le moment important de lever des options nationales, il se produit toujours des débats houleux dans la mesure où ces dossiers ont été examinés au sein de réseaux parallèles aux institutions nationales. Sans vouloir chercher à réveiller les vieux démons, les dernières interpellations et questions orales à l'Assemblée nationale ont largement démontré l'existence de ces «réseaux parallèles» pour ne pas dire « gouvernement parallèle».
Voilà que maintenant, au sein même de l'Exécutif, apparaissent des «groupuscules», comme si l'on violait expressément le décret portant organisation et fonctionnement du gouvernement. Sinon comment expliquer ce silence du gouvernement sur cette grève des médecins au cours de sa réunion d'hier mercredi, dite extraordinaire pendant qu'une autre réunion parallèle vole la vedette à l'Exécutif ? N'est-ce pas là une preuve suffisante de l'existence des réseaux parallèles et que l'on vient de faire confiance à ces rencontres parallèles par rapport à celle du gouvernement ? Autant d'interrogations pertinentes.
Qu'adviendra-t-il demain si l'on adoptait cette même attitude égoïste et suicidaire où les animateurs des institutions se rentrent dedans dans les domaines de la Sécurité interne et externe, la Diplomatie, la Défense, le Commerce extérieur? pour ne citer que ces secteurs-clé ? C'est la déstabilisation des institutions nationales.
Non ! Le clientélisme est une gangrène. Si elle s'installe dans les institutions nationales, ce serait enclencher le processus de l'auto-destruction de l'Etat congolais. Aussi, est-il important de retenir que l'échec ou la réussite d'un ministre est avant tout l'échec ou la réussite d'un gouvernement, des institutions nationales. Mieux, une affaire de tout un pays, car toute la Nation se retrouvera, dans un cas comme dans un autre, tant il est vrai qu'aucun ministre ne résolve les cas sociaux en puisant dans son salaire ou son compte propre. Mais dans les Fonds publics constitués par les contribuables.
En s'appuyant sur le domaine du sport, les présents Jeux Olympiques de Beijing l'ont largement prouvé. Tout le mérite reviendra à l'Etat et à la Nation chinoise.
Alors, il est temps de quitter ces vieux sentiers battus de l'égoïsme et de la médiocrité. Surtout du suicide collectif caractérisé, force nous est de le souligner, par l'absence d'un leadership fort.
Compte rendu de la réunion des ministres du mercredi 20 août 2008
Il s'est tenu hier mercredi 20 août une réunion extraordinaire du Conseil des Ministres à la Cité de l'Union Africaine, sous la présidence de S.E. Antoine Gizenga, Premier Ministre, Chef du Gouvernement.
Un seul point a figuré à l'ordre du jour, à savoir : examen de 3 projets d'ordonnance.
Le Ministre des Finances a présenté respectivement 3 projets d'ordonnance suivants:
1. Projet d'Ordonnance portant approbation de l'Accord du Don H362 du 26 mai 2008 conclu entre la RDC et l'Association Internationale de Développement au titre de financement supplémentaire pour le Projet d'Urgence de Démobilisation et Réintégration;
2. Projet d'Ordonnance portant approbation de l'Accord du Don H365 du 26 mai 2008 conclu entre la RDC et l'Association Internationale de Développement au titre de Projet de Renforcement des Capacités ;
3. Projet d'Ordonnance portant approbation de l'Accord du Don H366 du 26 mai 2008 conclu entre la RDC et l'Association Internationale de Développement au titre de financement additionnel au Projet compétitivité et développement du secteur privé.
Le Premier projet relatif à l'urgence de démobilisation et de réintégration, d'un montant de 31.300.000 DTS, comporte les volets suivants: la démobilisation, la réinsertion, la réintégration socio-économique des ex-combattants ainsi que la réintégration sociale et économique des femmes ex-combattantes, des ex-combattants handicapés et malades.
Le second projet relatif au renforcement des capacités, d'un montant de 31.300.000 DTS, comporte les volets suivants : le renforcement de la gestion des finances publiques et de l'administration publique, la constitution d'un système de gestion des finances publiques et de l'administration publique dans les provinces pilotes et la capacité de mise en forme de la réforme sur la gouvernance.
Enfin, le troisième projet relatif à la compétitivité et au développement du secteur privé, d'un montant de 37.500.000 DTS, comporte les volets renforcement du système judiciaire, amélioration du cadre légal et fiscal, promotion de l'intermédiation financière, promotion du dialogue entre le secteur privé et le secteur public, appui à la réforme des entreprises publiques et au fonctionnement du COPIREP.
Après débats et délibérations, le Conseil a approuve lesdits projets. Commencée à 10 heures, la réunion a pris fin à 11 heures.
Je vous remercie.
Fait à Kinshasa le 20 août 2008
Le Porte Parole du Gouvernement
Emile Bongeli Veikelo Va Ato