KINSHASA, le 10 mars (IRIN) - Les femmes sont toujours sous-représentées dans les cercles de prise de décision en République démocratique du Congo (RDC), réduites au rôle de ménagères et victimes de violences sexuelles répétées, ont fait remarquer mardi dernier des représentantes d'organisations féminines à l'occasion de la Journée internationale de la femme.
«Pourtant, c'est la femme qui est, dans bien des cas, la seule à tenir économiquement la famille en ce temps de crise multiforme aggravée par la guerre qui a fait d'elle la première victime de violences sexuelles» a dit Marie-Ange Lukiana Mufwankol, sénatrice et vice-présidente du parti du Président Joseph Kabila, Parti du peuple pour la Reconstruction et le développement (PPRD).
Les frustrations de la femme congolaise sont encore plus marquées au sénat où se tient un débat sur l'élaboration d'une nouvelle constitution avant les élections prévues cette année.
Selon Mufwankol, les femmes restent sous-représentées au sein des instances gouvernementales alors que le pays est signataire de plusieurs traités et conventions destinés à protéger et à promouvoir les droits de la femme.
Miranda Kabefor, conseillère auprès du Fonds de développement des Nations Unies pour les femmes (UNIFEM), a déclaré à IRIN que les femmes sont loin d'atteindre l'objectif de 30 pour cent de représentativité dans les instances décisionnelles du gouvernement comme le sénat, l'Assemblée nationale et la direction des sociétés d'état. Plus d'actions concrètes sont nécessaires.
«Les femmes ne veulent plus être de simples slogans ou de vains mots des autorités qui font semblant», a-t-elle dit.
Selon elle, sur les 61 ministres et secrétaires d'Etat qui compose le gouvernement de transition, on ne compte que 9 femmes et seulement 60 femmes parmi les 620 parlementaires qui siègent dans les deux chambres. On retrouve ce déséquilibre dans les sociétés d'Etats.
La faible représentativité des femmes au sein des instances gouvernementales pourrait s'expliquer par le faible taux de scolarisation des filles. Selon l'UNICEF, 49 pour cent des jeunes congolaises, moins d'une fillette sur deux, est scolarisée. Toutefois le taux de scolarisation des jeunes filles congolaises a augmenté grâce la campagne «Toutes les filles à l'école» que l'UNICEF mène depuis un an à travers le pays. Cette campagne consiste à offrir une inscription et une année scolaire gratuite aux filles congolaises en âge d'être scolarisées.
«Lors la campagne de 2004, le taux de scolarisation des filles est passé à 50,3%, ce qui est une légère amélioration», a fait remarquer Mohamed Fall, administrateur du programme d'éducation de l'Unicef.
«Avec les réseaux des femmes congolaises, nous menons un combat pour mettre fin à cette conception qui consiste à croire qu'il faut privilégier les garçons en les envoyant à l'école et garder les filles à la maison pour des travaux ménagers, les préparant ainsi au mariage parfois précoce», a ajouté Kabefor.
Pour Solange Kambidi, présidente de l'Union des femmes, cette conception est liée au fait que beaucoup d'hommes interdisent à leurs femmes de travailler dans des bureaux pour leur éviter le harcèlement sexuel, même si celles-ci ont parfois une formation universitaire.
«Le harcèlement sexuel est bien une réalité dans notre société, mais ce sont les mêmes hommes qui interdisent à leurs épouses de travailler qui harcèlent d'autres femmes», explique Kambidi.
Mais les femmes font parfois aussi du harcèlement sexuel à l'égard des hommes. Le réseau des femmes en est conscient et prévient : «les femmes doivent plutôt faire prévaloir leurs capacités et compétences que leur féminité mise en exergue par un habillement léger», a ajouté Kambidi.
Les femmes congolaises qui sont soumises à ces conditions se battent. Elles tiennent même à ce que le code de famille congolais soit modifié.
«Les femmes se battent, au niveau du ministère des droits de l'homme et de la solidarité nationale en vue d'obtenir une modification de la loi qui conditionne le travail ou le voyage de la femme à une autorisation préalable de son mari», a dit Kabefor.