Envoyé à la fin du mois d'août en République démocratique du Congo (RDC) par le chef de l'ONU, Ban Ki-moon, pour faire la lumière sur les circonstances des viols de masse perpétrés dans l'est du pays, le Sous-Secrétaire général aux opérations de maintien de la paix, Atul Khare, a réitéré mardi devant le Conseil de sécurité l'importance de mettre un terme à l'impunité et de mobiliser les moyens nécessaires pour traduire en justice les responsables de ces « crimes ».
« Il est essentiel que les responsables de ces crimes odieux soient rapidement arrêtés et traduits en justice », a souligné Atul Khare. Il a recommandé aux membres du Conseil de sécurité d'adopter des sanctions à l'encontre des dirigeants des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR) à l'intérieur du pays comme à l'extérieur.
« L'une des principales conclusions de ma visite est que le viol est la seule violence pour laquelle les communautés tendent à stigmatiser la victime plutôt que de poursuivre les responsables. Les victimes sont victimes deux fois : d'abord par les auteurs et ensuite par leurs communautés », a-t-il ajouté devant les 15 membres du Conseil de sécurité.
Au moins 240 civils ont été violés dans 13 villages le long d'une portion de route de 21 kilomètres du territoire de Banamukira, entre le 30 juillet et le 2 août. Les assaillants ont bloqué la route et empêché les villageois d'atteindre les communications extérieures pour demander de l'aide. De nombreuses maisons ont également été pillées.
Afin de collecter des informations, Atul Khare s'est rendu dans les villages de Kirumba, Kibua, Bukavu et Uvira. A Kinshasa, la capitale congolaise, il s'est entretenu avec des membres du gouvernement, dont le ministre des affaires étrangères et le vice Premier-ministre, ainsi qu'avec le Conseiller du Président congolais sur la sécurité. Il a aussi rencontré des représentants des organisations non gouvernementales et de la société civile.
Le Sous-Secrétaire général aux opérations de maintien de la paix a plaidé en faveur « du maintien de la pression militaire sur les groupes armés illégaux ; la mise en œuvre de mesures non-militaires pour résoudre le problème des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR) ; combattre l'exploitation illégale des ressources qui amène clairement la violence dans la région ; rétablir l'autorité de l'Etat dans les zones de conflits ».
Il aussi souligné qu'au regard de la situation, la solution sur le long terme sera de « renforcer les capacités de sécurité des autorités et l'Etat de droit, en particulier de transformer les forces armées et de police en forces protectrices de la population civile ».
Rappelant que « la protection des civils est la première des responsabilités de l'Etat, son armée nationale et ses forces de police, nous avons aussi c ». « Nous devons faire mieux », a-t-il ajouté.
Il a également annoncé que depuis le 1er septembre la Mission de Stabilisation des Nations Unies en République Démocratique du Congo (MONUSCO) avait lancé l'opération 'Shop Window' dans les zones de Pinga, Kibua et Walikale dans l'est du pays afin de rassurer la population et soutenir les forces de sécurité congolaise. Le déploiement de ces 750 casques bleus sur le périmètre des récentes violences sera prolongé jusqu'au 10 septembre et sûrement au-delà.
S'exprimant également mardi devant le Conseil de sécurité, la Représentante spéciale de l'ONU pour les violences sexuelles dans les confits, Margot Wallström, a exprimé son indignation face à ces viols.
Dans le village de Luvingi, une des femmes a raconté l'agression des hommes armés, a rapporté Margot Wallström. « Elle a décrit comment les hommes armés sont passés de maisons en maisons en forçant les portes, et comment les habitants ne pouvaient pas s'échapper, le village étant encerclé. Elle a décrit comment les hommes armés ont inséré leurs mains dans les parties génitales des femmes à la recherche d'or. De nombreuses femmes se sont faites violées en groupe par cinq ou six hommes à la fois », a dit Margot Wallström. « Les femmes de la République démocratique du Congo méritent mieux », a-t-elle ajouté.
« Il est évident que le viol est progressivement devenu 'l'arme de choix' à l'est de la RDC, atteignant des proportions endémiques », a-t-elle déploré, et de poursuivre, « j'exhorte le Conseil à prendre les mesures adéquates concernant les atrocités commises à Kibua en commençant par les commandants responsables de ces groupes armés ».
« Il en va de notre responsabilité collective envers les survivants et notre réaction collective face aux auteurs de ces crimes qui nous observent et qui attendent de voir comment le monde réagit. Notre politique de 'tolérance zéro' ne peut se concrétiser par une réalité où il y a 'zéro conséquence' », a-t-elle conclu.
Le 26 août dernier, à la suite de consultation sur la situation en RDC, les Etats membres du Conseil de sécurité de l'ONU ont exprimé « leur indignation » face aux viols de masse perpétrés par des membres des FDLR et des milices Maï-Maï.
Ces viols et agressions sont « un nouvel exemple grave du niveau de violence sexuelle et d'insécurité qui continue de ravager l'est de la RDC », avait pour sa part déclaré la veille Ban Ki-moon devant le Conseil de sécurité.