L’ayant aperçu au fond du restaurant où il est attablé, ils lancent un cri de ralliement. D’autres Congolais restés dehors pénètrent dans le hall. Le groupe, composé d’une dizaine de personnes, se dirige vers le gouverneur du Katanga.
Au même moment, les gardes du corps de Katumbi qui déjeunent avec lui se lèvent pour protéger leur patron. Entre les deux groupes, c’est la bagarre rangée. La résistance est musclée. Les agresseurs capitulent et réussissent tous à s’enfuir avant l’arrivée de la police appelée par le personnel de l’hôtel. Moïse Katumbi est sain et sauf.
« En allant en Europe, le gouverneur Katumbi s’était préparé en conséquence car la plupart des autorités congolaises qui sont passées par l’Europe ont été victimes des attaques de la part de ces combattants. Voila pourquoi il a amené avec lui toute sa garde rapprochée», indique son conseiller Salomon Idi qui raconte la scène de cette tentative d’agression.
Il précise qu’après cet incident, Moïse Katumbi poursuit son séjour en Belgique.
En décembre dernier, le président du Sénat congolais n’a pas lui réussi à échapper à ses agresseurs. Il a été battu à la veille du jour de l’an à la gare du Nord de Paris alors qu’il s’apprêtait à monter à bord de la voiture venue le chercher. Cet acte avait soulevé un tollé dans les milieux politiques congolais et la joie dans les rangs des agresseurs.
Ces derniers reprochaient à Léon Kengo d’avoir assisté à la prestation de serment du président Joseph Kabila réélu en novembre dernier pour un deuxième de 5 ans à l’issue d’un scrutin émaillé de nombreuses irrégularités, au dire des missions d’observations électorales congolaises et étrangères.
Annoncer tout déplacement des officiels
L’ambassadeur de Belgique en RDC, Dominique Struye de Swielande, a condamné, lundi 27 février, la tentative d’agression du gouverneur du Katanga. Le diplomate belge a insisté sur la nécessité pour la RDC d’informer officiellement son pays de la visite des autorités congolaises pour assurer leur sécurité.
«Il revient au gouvernement belge de protéger les autorités congolaises se déplaçant en Belgique, pour autant que les autorités belges aient été averties à temps », a-t-il déclaré à Radio Okapi.
C’est l’option qui avait été levée au lendemain de l’agression de Léon Kengo à Paris. Convoqué chez le ministre congolais des Affaires étrangères, Luc Hallade, l’ambassadeur de la France en RDC avait déclaré « qu’il était préférable dans le contexte actuel, que les personnalités congolaises qui sont appelées à se déplacer, fût-ce à titre privé, nous informent en amont pour qu’on puisse prendre des dispositions ad hoc pour pouvoir assurer leur sécurité sur place».
Par ailleurs, l’ambassadeur belge a annoncé que des poursuites sont déjà engagées contre les Congolais qui ont tenté d’agresser Moïse Katumbi.
«Elles pourront aboutir soit à des condamnations ou à des expulsions», a-t-il indiqué.
Les agresseurs : qui sont-ils ?
Les agresseurs des officiels congolais qui se rendent à l’étranger ne forment pas un groupe homogène. Après la publication des résultats de la présidentielle, certains ont organisé des marches voulues pacifiques dans plusieurs capitales européennes et qui ont dérapé à certains endroits.
Le bourgmestre de la commune d’Ixelles à Bruxelles avait dû interdire toutes les manifestations publiques pendant au moins une semaine en décembre dernier après que les manifestants congolais ont plusieurs fois cassé les magasins dans ce quartier africain.
Le dénominateur commun de ces Congolais de la diaspora : leur répulsion envers les autorités de Kinshasa. Ils sont très actifs sur Internet et les réseaux sociaux où ils ont créé des dizaines de forums de discussion pour appeler au changement de régime politique en RDC.
Très informés, ils guettent le moindre déplacement des officiels qu’ils tentent d’agresser dans les gares ou dans les hôtels où ils logent. Certains Congolais de la diaspora revendiquent leur appartenance à cette mouvance mais déclarent s’engager dans une lutte pacifique.
Le mouvement a pris de l’ampleur notamment lorsqu’ils ont investi pour quelques heures les ambassades de la République démocratique du Congo en France et en Afrique du Sud où ils avaient aussi tenté d’agresser le président de la Commission électorale de la RDC avant les élections. L’Afrique du Sud a engagé des poursuites contre ces Congolais dont certains qui y vivaient clandestinement ont étérapatriés en RDC.
« Dans les rangs des agresseurs, on dénombre des sans-papiers qui profitent notamment des manifestations publiques pour justifier leurs demandes d’asile politique », confie un observateur.