« Le pouvoir qui ne s’occupe pas du bien commun est un pouvoir sans objet ». C’est de cette manière que le cardinal Laurent Monsengwo Pasinya a interpellé la classe politique congolaise, en général, particulièrement le pouvoir de Kinshasa. Cela au vu des affres des bruits des bottes qui se poursuivent dans l’Est de la République mais aussi de la pauvreté qui frappe des franges importantes de la population.
Pour sa première célébration eucharistique en qualité de nouveau cardinal de la RDC, Laurent Monsengwo Pasinya a drainé hier dimanche une foule importante au stade des Martyrs de Kinshasa. Arrivé à bord d’une Jeep blanche ornée de guirlandes rouges, il a fait la ronde du stade pour saluer et bénir le public. Les fidèles étaient venus de tous les coins de la capitale, voire de plusieurs villes de la RDC.
L’ex-archevêque de la capitale congolaise a dit la messe d’actions de grâce entouré de l’évêque auxiliaire de Kinshasa, Mgr Edouard Kisonga, du chargé d’affaires de la nonciature apostolique, Mgr Santiago, du président de la Conférence épiscopale nationale du Congo, Mgr Nicolas Djomo accoudé à ses collègues du Congo Brazzaville, Mgr Louis Portella, et du Gabon.
Mais aux premières loges, l’on a noté la présence du président de la République, Joseph Kabila, qu’accompagnait son épouse Olive Lembe. Ils étaient entourés par les présidents des deux Chambres du Parlement, Evariste Boshab et Kengo wa Dondo, et du Premier ministre, Adolphe Muzito. Venaient au second plan des membres du gouvernement, des parlementaires, des ambassadeurs en poste à Kinshasa et autres personnalités diverses.
Dans son homélie, Laurent Monsengwo Pasinya s’est focalisé sur l’unité, la paix, la vérité, la justice et la réconciliation de tous. Son message a été étayé par des versets puisés du livre d’Esaïe (chapitre 11, 1-10), de l’épître de Saint Paul aux Romains (chapitre 8, 31-39) et de l’Evangile de Saint Mathieu (chapitre 13, 3-12).
Coïncidant avec le 2ème dimanche de l’Avent, l’Evangile de Saint Mathieu invite les chrétiens à se convertir. Surtout en ce moment où l’Eglise catholique romaine se prépare à accueillir Jésus, sauveur de l’humanité.
D’entrée de jeu, l’officiant a remercié le Seigneur pour tout ce qu’il a fait pour lui: « Cet événement, le peuple congolais l’a perçu comme un don de Dieu obtenu, grâce à ses prières ». Le nouveau cardinal a évoqué le pèlerinage effectué dernièrement par les Congolais à Rome et la présence d’une foule nombreuse venue assister à la messe. A ce sujet, il a rendu hommage au chef de l’Etat Joseph Kabila, pour sa présence à la célébration eucharistique du jour.
Nouveau cardinal de la RDC, Laurent Monsengwo Pasinya a exprimé sa reconnaissance au Pape Benoît XVI pour le choix porté sur sa modeste personne. Il a rappelé la recommandation du Saint Père aux nouveaux cardinaux, à savoir « être les témoins du Christ jusqu’à l’effusion du sang. Méditez et contemplez l’icône de Jésus qui est venu pour servir son peuple et non pour se servir ».
Paraphrasant le Pape Benoît XVI, l’ancien archevêque de Kinshasa a déclaré : « Le pouvoir n’a de sens que si l’on a le souci des autres, des pauvres et des laissés pour compte ». Ici, le « berger » s’est montré proche et compatissant à tout ce que vit dans sa chair le peuple congolais. Aussi l’a-t-il invité à travailler pour la paix, l’unité, la vérité, la justice et la réconciliation des filles et fils de la RDC. Il a dit avoir reçu du Saint Père la mission « d’édifier le Royaume de Dieu sans limite de vie et de vérité ; un Royaume de justice, d’amour et de paix ».
L’Eglise catholique romaine se souvient de la béatification par le Pape Jean-Paul II, le 15 août 1985, de la bienheureuse Marie-Clémentine Anuarite Nengapeta, comme « modèle d’amour, de fidélité, de pureté, de courage, de foi et d’espérance ». Celle-ci a été assassinée, le 1er décembre 1964, lors de la rébellion menée par Pierre Mulele, dans l’actuelle Province Orientale.
A ce sujet, le nouveau cardinal de la RDC a indiqué que le Pape Benoît XVI invite les dirigeants à se soucier de leur peuple. Selon lui, l’autorité doit être au service du bien commun. Il a insisté : « Le pouvoir qui ne s’occupe pas du bien commun est un pouvoir sans objet ».
Comme on peut le voir, le prélat interpelle la classe politique congolaise. Toutefois, son appel vise particulièrement le pouvoir de Kinshasa lequel devrait prendre ses responsabilités, notamment mettre fin à la guerre au Congo en général, et dans l’Est du pays en particulier. Le souci est de voir ceux qui font la guerre déposer leurs armes, en vue de faire la paix dans la justice d’abord et ensuite dans la réconciliation.
Laurent Monsengwo s’est montré préoccupé par la paupérisation du peuple alors que le pays dispose de tous les atouts pour le rendre heureux et prospère. Il a fait allusion au pillage des ressources naturelles de la RDC et à la signature de nombreux contrats et accords dont la population ne sent toujours pas les effets bénéfiques dans son vécu quotidien.
De son côté, l’évêque auxiliaire de Kinshasa, Mgr Edouard Kisonga, a dit : « La province ecclésiastique de Kinshasa est en fête ». Une joie qui, selon ses propres paroles, « est partagée par les autres provinces ecclésiastiques du pays ».
Pour ce qui est de l’élévation de Laurent Monsengwo à la dignité cardinalice, Mgr Kisonga a fait remarquer qu’il s’agit à la fois d’un honneur et d’une charge. Une charge, car le nouveau promu va « porter sa croix jusqu’au sacrifice suprême ».
Le président de la Conférence épiscopale nationale du Congo-Brazzaville, Mgr Louis Portella, a pour sa part, rappelé que le cardinal doit être attentif non seulement à l’Eglise locale, mais aussi à l’Eglise universelle. Et de souligner : « Les cardinaux ont un grand rôle à jouer, celui de protéger et défendre le peuple de Dieu ».
Pour le président de la CENCO, l’élévation de Mgr Monsengwo au rang de cardinal « est un honneur pour la RDC, voire pour l’Afrique ». Avant de louer les qualités morales, humaines, intellectuelles et spirituelles du nouveau cardinal. Il a, enfin, rassuré à Laurent Monsengwo de compter sur l’appui de la CENCO ainsi que sur les prières de tous les chrétiens dans sa lourde tâche.
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