Les experts sont inquiets. Selon eux, le lac Kivu risque à tout moment d’exploser. C’est sur cette question d’actualité que s’est tenue la plénière de l’Assemblée nationale d’hier mercredi.
Le lac Kivu serait-il la bombe à retardement de la RDC ? Oui, si l’on en croit les différentes expertises. Une émanation d’hydrocarbures, bref une explosion, serait susceptible de se déclencher à tout moment. Les conséquences de ce phénomène naturel seraient dramatiques pour la population. Les villes de Goma, Bukavu et Idjwi seraient particulièrement touchées. Ces habitants souffriront, dès lors, d’une asphyxie parce que ce lac se situe dans une cuvette, ce qui empêche le vent d’entraîner plus facilement les produits nocifs.
Le dioxyde de carbone et le gaz méthane sont un couple bien mal assorti. C’est principalement à cause de la pression du gaz méthane, et non le dioxyde de carbone, que le danger menace la région du Kivu. Un paradoxe… Le gouvernement pourrait renverser la situation en sa faveur. Ce détonateur, source d’inquiétudes, peut devenir une source d’énergie pour le pays. Le gouvernement pourrait exploiter ce gaz et le changer en électricité.
Le désamorcement est donc au cœur des polémiques. Hier mercredi, les députés ont interrogé le ministre des Hydrocarbures, Célestin MBuyu sur ce sujet sensible. Sa réponse : « Nous avons mis en place trois millions d’euros pour réaliser une expertise au lac. Ils ont mis le doigt sur le problème réel. Sans le gaz méthane, le dioxyde de carbone est quasiment inoffensif. Il faudra extraire cet élément. C’est une question d’intérêt national. Il s’agit du bien-être de la population. L’extraction devra se passer de manière sécurisée afin de supprimer tout risque d’explosion ».
Une réponse peu rassurante pour les députés. Pour Jean Bamanisa, il faut des propositions claires et transparentes. « Le 13 juin 2008, j’avais déjà émis les mêmes inquiétudes. Depuis deux ans, elles restent sans réponses », note-t-il. Pour se défendre, le ministre explique les obstacles à la transformation du gaz méthane en énergie. Selon lui, il faut préalablement déterminer avec exactitude la capacité pétrolière du lac. En outre, l’extraction off shore ne sera pas une mince affaire, vu la profondeur des ressources. Mais l’enjeu reste surtout politique. Chacun veut sa part du gâteau. Les parts devront être divisées entre le Rwanda et la RDC.
UNE RESSOURCE PETROLIERE INDETERMINEE
Evidemment, changer ces particules en or noir ne se fait pas d’un coup de baguette magique. La RDC devra créer une usine pétrolière. Et lorsqu’il s’agit de débloquer de l’argent, le gouvernement demeure réticent. Pourtant, ces raffineries pourraient faire le bonheur de l’Etat. Bien décidé à profiter des ressources pétrolières de la RDC, il a décidé de prendre des parts directes dans les sociétés de raffineries. Les bénéfices tomberont ainsi directement dans les poches du gouvernement. Un argument de poids. Mais le pétrole est loin d’être la préoccupation première de Célestin MBuyu « Il faut d’abord s’occuper des matières primaires telles que l’éducation, la santé au lieu de dégager des millions de dollars dans la recherche, fut-elle, pétrolière », note le ministre des Hydrocarbures. Les habitants du Kivu ont encore du souci à se faire, en attendant un réel engagement de l’Etat.
Autre point à l’ordre du jour de la séance plénière : l’environnement. Pas moins de six milles tonnes de déchets sont déversés chaque jour à Kinshasa. Un chiffre énorme qui pose des questions sur la gestion de ces déchets. Pour ne pas être à la traine par rapport aux autres pays, le ministère de l’Environnement devra mettre les bouchées doubles. Un geste qui augmenterait considérablement le confort des citoyens. En effet, les déchets peuvent être à la base de certaines maladies. Mais là encore, la réticence est de mise. « Les moyens financiers sont trop limités pour vraiment mener une politique d’assainissement. Il faudra aussi une éducation à l’environnement », explique José Endundo, ministre de l’Environnement. En outre, selon lui, l’insalubrité est étroitement liée à la pauvreté.
DEBORAH TOUSSAINT (STAGIAIRE DE LOUVAIN-LA-NEUVE)
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