Après un cessez-le-feu qui a duré près de deux mois, les combats ont repris le 14 juillet entre les forces armées congolaises et les rebelles du M23 près de la ville de Goma, dans l'est de la RD Congo.
Des habitants de la région et des rebelles déserteurs ont décrit de récentes activités attestant que les forces criminelles du M23 ont reçu de l'aide en provenance du Rwanda. Parmi ces activités figurent des mouvements réguliers du Rwanda vers la RD Congo d'hommes en uniforme de l'armée rwandaise et l’approvisionnement du M23 en munitions, en vivres et en autres fournitures provenant du Rwanda. Le M23 a mené des opérations de recrutement au Rwanda. Des officiers de l'armée rwandaise ont formé de nouvelles recrues du M23 et ont communiqué avec et rencontré des dirigeants du M23 à plusieurs reprises.
« Non seulement le Rwanda permet au M23 de se procurer des recrues et de l'équipement sur son territoire, mais les militaires rwandais continuent d'apporter un soutien direct à ce groupe qui commet des exactions », a déclaré Daniel Bekele, directeur de la division Afrique à Human Rights Watch. « Ce soutien renforce un groupe armé qui est responsable de nombreux meurtres, viols et autres crimes graves.»
Les informations récemment recueillies par Human Rights Watch proviennent de plus de 100 entretiens réalisés depuis mars, y compris avec des anciens combattants du M23 qui ont quitté le mouvement entre fin mars et juillet et avec des civils vivant près de la frontière rwando-congolaise, dont certains ont été victimes d'exactions.
En plus des exactions commises par le M23, Human Rights Watch a documenté plusieurs meurtres et viols commis par des miliciens hutus congolais actifs dans les zones contrôlées par le M23 et aux alentours. Certains officiers de l'armée congolaise auraient apporté un soutien à des factions de ces groupes, ainsi qu'à des factions des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR) – un groupe armé rwandais à majorité hutue, allié à ces milices congolaises, et dont certains membres ont participé au génocide de 1994 au Rwanda.
Depuis sa création en avril 2012, le M23 a commis des violations des lois de la guerre sur une grande échelle. Malgré les nombreux crimes de guerre commis par ses combattants, le M23 a reçu unappui substantiel de la part de responsables militaires rwandais. Après avoir brièvement occupé Goma en novembre et s'en être retiré le 1er décembre, le M23 contrôle actuellement la majeure partie des territoires de Rutshuru et de Nyiragongo, à proximité de la frontière rwandaise.
Les 25 et 26 avril, des combattants du M23 ont tué 15 civils d'ethnie hutue dans plusieurs villages du groupement de Busanza dans le territoire de Rutshuru, et au moins six autres à la mi-juin, apparemment pour « punir » les villageois pour leur prétendue collaboration avec des milices hutues congolaises.
Parmi d'autres civils tués par les combattants du M23 depuis mars, figurent un homme âgé de 62 ans qui a été abattu pour avoir refusé de remettre ses fils au M23, un chauffeur de moto qui refusait de donner de l'argent à ce groupe, de nouvelles recrues du M23 capturées après avoir tenté de s'enfuir, et d'autres accusés de collaboration avec des milices hutues.
Le 5 juillet, quatre combattants du M23 ont violé une fille de 12 ans alors qu'elle allait chercher de l'eau près de son village dans le territoire de Rutshuru. Un combattant du M23 a accosté une jeune femme de 18 ans près de Bunagana le 15 avril, et lui a tiré une balle dans la jambe parce qu'elle a refusé d'avoir une relation sexuelle avec lui.
Depuis juin, des commandants du M23 ont forcé des chefs coutumiers dans les zones qu'ils contrôlent à suivre une formation militaire et idéologique et à fournir des recrues au M23. Le M23 considère ces chefs locaux comme constituant une « force de réserve », sur laquelle ils veulent pouvoir compter pour leur fournir un appui lors d'opérations militaires.
Des combattants du M23 ont arrêté ou enlevé des dizaines de civils au cours des dernières semaines dans le territoire de Rutshuru, la plupart d'ethnie hutue. Le M23 a accusé beaucoup d'entre eux de collaborer avec les FDLR ou avec les milices hutues congolaises qui sont leurs alliées. Les combattants du M23 les ont sévèrement battus, les ont ligotés et gardés prisonniers. Le M23 a ensuite forcé beaucoup d'entre eux à suivre une formation militaire et à rejoindre leurs rangs.
Un ancien policier du M23, qui a déserté en avril, a indiqué à Human Rights Watch qu'il avait participé à des enquêtes sur des meurtres de civils. Il a affirmé qu'avant chaque enquête, un commandant de haut rang du M23, Innocent Kayna, lui avait dit: « C'est toi qui mènera l'enquête. Et tu diras que ce sont des bandits de la région qui ont tué, pas le M23.»
Human Rights Watch a contacté le chef militaire du M23, Sultani Makenga, mais il n’était pas disponible pour commenter les récentes exactions présumées.
Parmi les hommes recrutés au Rwanda par le M23, figurent des militaires rwandais démobilisés et d'anciens combattants des FDLR, dont la plupart avaient été intégrés dans la Force de réserve de l'armée rwandaise, ainsi que des civils rwandais. Un jeune Rwandais âgé de 15 ans a raconté à Human Rights Watch que lui et trois autres jeunes hommes et garçons avaient reçu la promesse d'emplois en tant que gardiens de vaches en RD Congo, mais qu'une fois arrivés dans ce pays, ils avaient été forcés de rejoindre le M23. Ils ont suivi en RD Congo une formation militaire dispensée par des officiers rwandais et on les a avertis qu'ils seraient abattus s'ils tentaient de s'enfuir. D'autres déserteurs du M23 ont également affirmé que des officiers rwandais formaient les nouvelles recrues de ce groupe.
D'anciens officiers du M23 ayant appartenu à d'anciennes rébellions soutenues par le Rwanda ont affirmé avoir reconnu des membres de l'armée rwandaise parmi les officiers opérant dans les rangs du M23. Des déserteurs congolais ont indiqué à Human Rights Watch qu'un certain nombre de combattants du M23 reconnaissaient volontiers qu'ils étaient rwandais. Certains indiquaient avoir été membres des contingents rwandais des missions de maintien de la paix en Somalie ou au Darfour.
De récents déserteurs du M23 interrogés par Human Rights Watch ont décrit des arrivées fréquentes – parfois hebdomadaires – de militaires et de recrues en provenance du Rwanda. Parfois il s'agissait de rotations, des hommes nouveaux en remplaçant d'autres qui étaient retournés au Rwanda. Des armes, des munitions, des citernes de lait, des camions de riz et d'autres fournitures étaient acheminés du Rwanda à l'intention du M23. Des déserteurs du M23 ont également fait état de conversations téléphoniques et de rencontres, au Rwanda et en RD Congo, entre des commandants de haut rang du M23 et des hommes dont les déserteurs avaient entendu dire qu'ils étaient des responsables rwandais ou qu'ils connaissaient eux-mêmes comme tels.
Tous les récents déserteurs du M23 interrogés par Human Rights Watch ont affirmé que des soldats, des officiers et des formateurs rwandais étaient présents pendant tout le temps qu'ils avaient passé au sein du M23, et que de nouvelles recrues étaient arrivées en provenance du Rwanda au cours des derniers mois.
« Au cours des 17 dernières années, l'armée rwandaise a à maintes reprises envoyé des troupes dans l'est de la RD Congo et soutenu des forces agissant pour son compte et qui se sont rendues responsables d’exactions et de crimes de guerre», a conclu Daniel Bekele. « Comme dans le passé, le Rwanda nie qu'il soutient le M23, mais les faits sur le terrain contredisent ces démentis.»
Des demandes d'entretien adressées par Human Rights Watch à des responsables gouvernementaux et militaires rwandais sont restées sans réponse de leur part. Dans le passé, les autorités rwandaises ont nié à plusieurs reprises les allégations selon lesquelles le gouvernement apportait son soutien au M23.
Le gouvernement rwandais devrait immédiatement cesser toute forme de soutien au M23 en raison du comportement souvent abusif de ce groupe, a déclaré Human Rights Watch. Les envoyés spéciaux des Nations Unies et des États-Unis dans la région des Grands Lacs, ainsi que les gouvernements des pays bailleurs de fonds, devraient dénoncer publiquement le soutien continu apporté par le Rwanda au M23 et appeler à l'imposition de sanctions contre les hauts responsables rwandais qui sont responsables de ce soutien.
Le gouvernement congolais devrait immédiatement suspendre, soumettre à enquête et, s'il y a lieu, engager des poursuites contre les officiers militaires et les responsables gouvernementaux congolais qui ont fourni un appui aux FDLR ou à des groupes qui leur sont alliés. Le gouvernement devrait proclamer clairement que les commandants des milices qui commettent des exactions ne seront pas intégrés dans l'armée congolaise dans le cadre d'un éventuel accord politique.
Selon des journalistes de la presse internationale qui étaient présents près de la ligne de front et selon des photos examinées par Human Rights Watch, des militaires de l'armée congolaise ont traité de manière dégradante les cadavres de combattants du M23 tués lors d'affrontements le 16 juillet, les déshabillant, agitant leurs organes génitaux avec leurs armes et proférant des insultes à caractère ethnique. Le droit international interdit de commettre des « atteintes à la dignité de la personne », y compris contre des morts. Human Rights Watch a également documenté des incidents lors desquels l'armée congolaise a détenu d'anciens combattants du M23 et des collaborateurs présumés de ce groupe pendant plusieurs semaines, sans les déférer devant un tribunal, et souvent en les maintenant au secret dans des conditions pénibles.
Les autorités militaires congolaises devraient sanctionner de manière appropriée les officiers et les soldats responsables du mauvais traitement de cadavres, et s'assurer que de tels actes cessent immédiatement. Les autorités militaires et judiciaires devraient s'assurer que les combattants et les civils capturés soient traités en conformité avec les normes internationales en matière de régularité des procédures, notamment en étant rapidement déférés devant un juge et inculpés, ou libérés. Les détenus ne devraient pas être maltraités ou incarcérés dans des conditions inhumaines.
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Informations complémentaires et recommendations
Exécutions sommaires et autres exactions commises par le M23
Human Rights Watch a documenté 44 exécutions sommaires commises par le M23 depuis mars. Les combattants du M23 ont également tué ou blessé un nombre indéterminé de civils, dont certains ont été pris entre deux feux pendant les combats.
Les combattants du M23 ont tué 15 civils hutus dans plusieurs villages du groupement de Busanza dans le territoire de Rutshuru les 25 et 26 avril, et au moins six autres à la mi-juin, dans une apparente tentative de « punir» les villageois pour collaboration présumée avec des milices hutues congolaises.
Pendant l'attaque de la nuit du 25 avril, un groupe de combattants du M23 a traversé les villages de Ruvumbura, Kirambo, Nyamagana et Shinda, tuant et pillant sur leur passage. Une mère de trois enfants, âgée de 43 ans, a dit à Human Rights Watch: « Quand ils ont commencé à tuer des gens, nous avons fui dans la brousse. Mon mari est retourné chercher nos biens et ils l'ont tué. Ils lui ont tiré une balle dans la tête.»
Fin mai, des combattants du M23 ont abattu un homme de 62 ans à Ntamugenga parce qu'il refusait de remettre ses fils au M23. Le 15 mai, des combattants du M23 ont arrêté un chauffeur de moto près de Kiwanja et l'ont tué parce qu'il refusait de leur donner de l'argent. À la mi-juin, des combattants du M23 ont tué de plusieurs balles dans la poitrine un changeur de monnaie. Puis ils ont dit à sa femme: « Donne-nous de l'argent ou nous te ferons la même chose qu'à ton mari.»Elle leur a donné de l'argent et ils sont partis.
À Kibumba à la mi-mai, un officier du M23, le colonel Yusuf Mboneza, a ordonné l'exécution d'un homme de 24 ans qu'il accusait d'être un voleur. Après l'exécution, Mboneza a convoqué les villageois à une réunion lors de laquelle il leur a montré le corps du jeune homme, disant que cela devrait servir d'avertissement à quiconque serait tenté de voler.
De nouvelles recrues et des prisonniers qui tentaient de s'enfuir étaient parmi les autres personnes exécutées sommairement par le M23 depuis mars.
Le 21 juin, les combattants du M23 ont capturé un des leurs, un Congolais nommé « Tupac», alors qu'il essayait de s'enfuir, près de Kabuhanga. Ils l'ont ramené au camp militaire de Kamahoro, où le commandant a ordonné à ses troupes de se mettre en formation et de l'abattre pour décourager d'autres désertions. Ils ont tué Tupac de deux balles dans la poitrine tirées à bout portant. Un déserteur du M23 a dit à Human Rights Watch qu'il avait été forcé, avec d'autres recrues, d'enterrer Tupac.
Après un accrochage entre le M23 et une milice hutue congolaise le 18 juin, des combattants du M23 ont pillé plusieurs villages dans la région de Busanza. Les combattants ont demandé de l'argent à une femme de 33 ans. Quand elle a dit qu'elle n'en avait pas, ils lui ont entaillé l'épaule d'un coup de machette et ont frappé son fils de 11 ans à la tête. Le 15 avril, une jeune femme de 18 ans a reçu une balle dans la jambe parce qu'elle a refusé d'avoir une relation sexuelle avec un combattant du M23 qui l'avait abordée dans sa ferme près de Bunagana. Les victimes de ces agressions ont survécu, mais avec de graves blessures.
Viols commis par des combattants du M23
Human Rights Watch a documenté 61 cas de viol de femmes ou de filles par des combattants du M23 entre mars et début juillet. En raison de la marque d'infamie qui s'attache au viol et de la peur de représailles, le nombre réel des victimes est probablement beaucoup plus élevé. Beaucoup des victimes de viol étaient dans leurs champs ou en train de ramasser du bois. Les combattants du M23 ont accusé certaines d'entre elles d'être les « épouses» de combattants des FDLR. La plupart des viols ont été commis à proximité de positions du M23 et certaines victimes ont reconnu leurs agresseurs comme étant des combattants du M23 qu'elles avaient vus auparavant. Fréquemment, les violeurs avertissaient leurs victimes qu'elles seraient tuées si elles parlaient du viol ou si elles cherchaient à recevoir des soins médicaux.
Une fille de 12 ans a dit à Human Rights Watch qu'un combattant du M23 l'avait capturée et violée en juin alors qu'avec des amies, elle achetait de la canne à sucre dans un champ proche d'une position du M23, dans le territoire de Rutshuru:
J'ai vu un soldat [du M23]. Je me suis mise à courir mais j'ai trébuché sur un morceau de canne à sucre et je suis tombée. Le soldat m'a rattrapée et a dit qu'il allait me tuer parce que j'avais tenté de m'enfuir. Je me suis arrêtée parce que j'avais très peur. Alors il m'a violée. J'ai crié mais il m'a baillonnée.
Une jeune fille de 17 ans a affirmé avoir été violée à deux reprises par des combattants du M23. La seconde fois, en juin, cela s'est produit alors qu'elle était seule à son domicile après que des policiers du M23 eurent enlevé son mari et l'eurent forcé à rejoindre leur patrouille de nuit:
Le combattant du M23 est venu chez moi et m'a demandé où était mon mari. Puis il m'a mis un couteau contre la poitrine et a dit qu'il allait me tuer et que je devais lui donner de l'argent. Je lui ai dit que je n'avais pas d'argent, que mon mari l'avait pris en partant en patrouille. J'étais assise sur le lit avec mon enfant. Le soldat a lutté avec moi sur le lit. Il était plus fort que moi et il avait un fusil. Et il m'a violée.
Une femme hutue de 35 ans, violée par un combattant du M23 en juin près de Bunagana, a dit à Human Rights Watch:
Quand il a fini, il m'a laissée dans la forêt. Je tremblais et je me suis tournée vers le sol, en pleurant.… Celui qui m'a violée était un combattant du M23 que je connais. Je l'ai reconnu mais que puis-je faire contre lui?
Recrutement forcé, notamment d'enfants, et enlèvements commis par le M23
Human Rights Watch a documenté des dizaines de cas de recrutement de force par le M23 depuis mars, y compris d'enfants. Le recrutement semble avoir augmenté au cours des derniers mois, à mesure que le M23 rencontrait des difficultés pour maintenir ses effectifs. Plus de 700 combattants et cadres politiques du M23 se sont réfugiés au Rwanda quand la faction du M23 dirigée par Bosco Ntaganda a subi une défaite en mars face à celle commandée par Sultani Makenga, environ 200 hommes du M23 ont péri dans les combats internes et dizaines d’autres ont déserté.
Depuis juin, la hiérarchie du M23 a tenu plusieurs réunions avec des chefs coutumiers et d'autres autorités locales pour demander leur aide dans le recrutement de nouveaux combattants. Début juin, le M23 a contraint des chefs coutumiers et de village à assister à un programme de formation militaire d'une semaine, prodigué par des officiers rwandais. Ils ont aussi reçu une « formation idéologique», qui incluait la vision du M23 pour s'emparer de la totalité de la RD Congo.
Les chefs ont été libérés mais sont censés constituer une partie d'une « force de réserve » à laquelle le M23 peut faire appel en cas de nécessité. Le M23 leur a ordonné de trouver des recrues dans leurs villages et de les envoyer au M23. Un responsable local qui a participé à la formation a indiqué à Human Rights Watch qu'on leur avait demandé de donner aux cadres du M23 les noms des jeunes de leurs villages qui avaient été démobilisés, afin que le M23 « puisse s'y rendre lui-même, trouver ces jeunes et s'assurer qu'ils rejoignent le mouvement.»
Le M23 a arrêté des civils hutus qu'ils accusaient de soutenir ou de collaborer avec les FDLR ou avec des milices hutues congolaises. Les combattants ont détenu, passé à tabac et fouetté ces civils, et en ont emmené beaucoup dans un camp militaire du M23, où ils ont subi un entraînement et été forcés de rejoindre le mouvement en tant que combattants.
Un élève d’école secondaire, âgé de 19 ans, a dit à Human Rights Watch qu'il avait été recruté de force par le M23 en mars, alors qu'il travaillait aux champs près de Kalengera, dans le territoire de Rutshuru:
J'ai vu des M23 arriver et m'encercler. Ils m'ont demandé si j'étais membre des FDLR et j'ai dit que non. Alors ils se sont mis à me frapper et à me fouetter. Ils m'ont ligoté et m'ont emmené à Rumangabo, où ils m'ont enfermé dans un cachot. Au bout de deux jours, ils m'ont détaché mais m'ont laissé dans le cachot pendant une semaine. Après quoi ils m'ont dit que j'allais devenir un combattant. Puis, ils ont commencé la formation militaire. Nous étions 80 à subir cet entraînement. La formation était dirigée par dix officiers venus du Rwanda. Ils nous ont dit que nous devions devenir des soldats afin de pouvoir combattre pour libérer Goma et ensuite toute la province du Sud Kivu.
Le 3 juin, le M23 a fait du porte à porte dans le quartier de Kachemu à Kiwanja, appréhendant environ 40 jeunes hommes et garçons qu'ils accusaient de collaborer avec une milice locale. Les combattants ont battu ces civils et les ont détenus dans un cachot à la base du M23 à Nyongera. Beaucoup d'entre eux avaient du mal à marcher le lendemain du fait de ces mauvais traitements. Environ la moitié de ces jeunes ont été libérés après que leurs familles eurent versé de l'argent aux gardes du M23; 20 d'entre eux ont été emmenés à Rumangabo pour y subir une formation de combattant.
Dans d'autres cas, les familles ignorent le sort de leurs proches qui ont été enlevés. En mars et en avril, par exemple, des combattants du M23 à Busanza ont enlevé quatre jeunes hommes qu'ils accusaient de collaborer avec une milice hutue congolaise. Depuis, leurs familles n'ont eu aucune nouvelle d'eux.
Des militaires de l'armée congolaise qui ont été capturés par le M23 ont décrit comment ils avaient été maltraités et torturés pendant leur détention. Un soldat, capturé par le M23 en décembre et qui s'est échappé début juillet, a affirmé que deux autres soldats congolais détenus avec lui avaient été battus à mort. Pendant trois jours, les rebelles ont frappé les prisonniers à coups de bâton et leur ont piétiné la poitrine, alors que leurs bras et leurs jambes étaient entravées. Pendant qu'ils les frappaient, les M23 leur demandaient des informations sur les lieux où l'armée congolaise cachait ses armes. Les deux hommes n'ont reçu aucun soin médical et sont morts en détention.
Recrutement par le M23 au Rwanda et autres formes d'assistance rwandaise
Sur la base d'entretiens avec 31 anciens combattants du M23 qui ont déserté depuis la fin mars et avec de nombreux civils vivant des deux côtés de la frontière, Human Rights Watch a documenté le soutien militaire apporté par le Rwanda au M23. Ce soutien comprend la fourniture d'armes et de munitions. Des hommes armés en uniforme militaire ont fréquemment franchi la frontière du Rwanda pour se rendre en RD Congo et soutenir le M23; il pouvait s'agir de nouvelles recrues ou de militaires démobilisés à qui on avait donné des uniformes avant qu'ils ne pénètrent en RD Congo, ou de militaires de l'armée active rwandaise. Des officiers de l'armée rwandaise ont été vus dans des bases du M23, dirigeant les programmes de formation des nouvelles recrues, ou effectuant des opérations de recrutement pour le M23 au Rwanda.
Parmi les hommes recrutés au Rwanda et emmenés de l'autre côté de la frontière pour combattre dans les rangs du M23, figurent des militaires rwandais démobilisés et d'anciens combattants des FDLR qui font partie de la Force de réserve de l'armée rwandaise, ainsi que des civils, dont de jeunes garçons. Entre janvier et juin, les Casques bleus des Nations Unies ont démobilisé et rapatrié 56 anciens combattants du M23 qui affirmaient être de nationalité rwandaise. Mais des déserteurs du M23 interrogés par Human Rights Watch, ainsi que le Groupe d'experts de l'ONU sur la République démocratique du Congo, ont affirmé que des officiers de l'armée rwandaise avaient ramené de force des ressortissants rwandais qui avaient fui le M23 et essayaient de rentrer au Rwanda.
Human Rights Watch a documenté les cas de sept enfants rwandais, âgés de 15, 16 et 17 ans, qui ont été recrutés de force au Rwanda en mars et en avril, puis contraints de se battre dans les rangs du M23, avant de parvenir à s'échapper. Human Rights Watch a reçu des informations concernant d'autres enfants recrutés au Rwanda au cours de ces derniers mois et qui, eux, n'ont pas pu s'enfuir.
Un jeune Rwandais âgé de 15 ans a affirmé à Human Rights Watch qu'il avait été recruté de force dans son village du district de Nyabihu au Rwanda fin avril, en même temps que deux autres garçons et un jeune homme. Tous les quatre fabriquaient des briques lorsque deux hommes en civil sont venus leur offrir des emplois de gardiens de vaches en RD Congo. Ces deux hommes les ont emmenés à moto à la frontière congolaise, puis jusqu'à un camp militaire du M23. Ils ont été forcés de devenir des combattants et avertis qu'ils seraient tués s'ils refusaient ou s'ils tentaient de s'enfuir.
Le garçon de 15 ans a précisé que des officiers de l'armée rwandaise leur avaient fait suivre une formation militaire de 10 jours et que de nombreux autres Rwandais faisaient partie de son groupe de 58 nouvelles recrues. Il a ajouté que certaines de recrues rwandaises ont essayé de s'enfuir mais ont été rattrapées et ramenées au camp.
Un officier congolais du M23 qui a déserté fin mai a dit à Human Rights Watch que pendant tout le temps qu'il avait passé au sein du M23, de novembre à mai, des soldats et des recrues arrivaient du Rwanda régulièrement. Il a précisé que les soldats allaient et venaient lors d’opérations de relève. En revanche, les recrues devaient suivre une formation militaire et étaient contraints de rester en RD Congo. Beaucoup ont tenté de fuir et de retourner au Rwanda, selon lui, mais plusieurs d'entre eux ont été capturés dès leur passage au Rwanda et ramenés au M23.
Un déserteur a indiqué à Human Rights Watch qu'un militaire rwandais appartenant à son unité lui avait dit en avril qu'il était un soldat démobilisé et qu'il était venu combattre en RD Congo afin de pouvoir monter en grade dans l'armée rwandaise à son retour. Il a ajouté que deux autres Rwandais de son unité s'étaient enfuis au Rwanda en mars, mais avaient été à nouveau recrutés et ramenés au M23. Un ancien officier du M23 a indiqué que deux Rwandais de son unité s'étaient enfuis à la mi-avril. Peu après leur arrivée au Rwanda, selon l'ancien officier, les autorités locales ont informé des responsables des services de renseignement militaire, qui ont ramené les deux hommes au M23. Ils ont été détenus par le M23 pendant une semaine, puis redéployés.
Des déserteurs du M23, ainsi que des villageois rwandais, ont déclaré que des militaires rwandais et de nouvelles recrues franchissaient souvent la frontière à pied de nuit, empruntant des sentiers isolés à travers le Parc national des Virunga.
Deux anciens officiers du M23 ont affirmé à Human Rights Watch que certains des combattants rwandais de leurs unités leur avaient dit avoir fait partie des contingents fournis par le Rwanda aux opérations de maintien de la paix en Somalie ou au Darfour. Plusieurs déserteurs du M23 interrogés par Human Rights Watch, qui avaient fait partie d'anciens mouvements rebelles soutenus par le Rwanda, ont affirmé avoir reconnu des officiers de l'armée rwandaise grâce à leur propre expérience au sein de cette armée.
Un Congolais originaire de Ntamugenga a été recruté de force en mai et contraint de suivre une formation militaire. « Dans notre groupe, nous étions 107 à suivre des formations », a-t-il dit. « La plupart des autres étaient des Rwandais. Ils m'ont dit qu'ils avaient été trompés et qu'on leur avait promis de l'argent s'ils venaient au Congo. Beaucoup étaient des enfants. Les officiers venus du Rwanda nous dispensaient la formation et ils nous ont dit eux-mêmes qu'ils vivaient au Rwanda. [Après la formation], il y avait des militaires rwandais démobilisés et quelques anciens des FDLR dans mon groupe.»
Plusieurs déserteurs du M23 qui se sont enfuis depuis la fin mai ont décrit à Human Rights Watch la différence de traitement entre entre les Rwandais et les Congolais au sein du mouvement rebelle. L'un d'eux a déclaré:
Les Rwandais sont favorisés. On leur donne des uniformes immédiatement, des couvertures et des bottes. Ils sont gâtés. Quand ils parlent, c'est comme s'ils étaient les patrons du mouvement. J'ai ressenti cette menace. [Ils] me traitaient de vaurien. Ils disaient: « Tu n'as aucune valeur dans ton pays.» Ils m'insultaient avec des mots qu'on ne peut prononcer trop fort. Ils disaient: « Vous les Congolais, vous avez peut-être fait des études mais vous n'avez jamais combattu au front.»
Des déserteurs du M23 ont décrit des livraisons d'armes, de munitions, de vivres, d’unités de communication téléphonique et d'autres fournitures en provenance du Rwanda. Un ancien officier a indiqué que les femmes des officiers rwandais venaient souvent leur rendre visite dans les zones tenues par le M23 en RD Congo, apportant des lettres de membres de leur famille restés au Rwanda.
Tous les déserteurs du M23 interrogés par Human Rights Watch ont affirmé que la présence de militaires, d'officiers et de formateurs rwandais s'étaient poursuivie pendant toute la durée de leur engagement au sein du mouvement, et que de nouveaux renforts – souvent déjà munis de divers équipements, notamment militaires – continuaient d'arriver du Rwanda au cours des derniers mois.
Trois anciens officiers du M23, proches de la hiérarchie du mouvement, ont indiqué à Human Rights Watch que les plus hauts commandants militaires du M23 s'entretenaient au téléphone et rencontraient régulièrement des officiers supérieurs de l'armée rwandaise, au moins jusque fin mai ou début juin, date de la désertion des trois officiers. Parfois, des officiers rwandais venaient à Tshanzu ou à Rumangabo pour rencontrer les chefs du M23, parfois c'étaient les dirigeants du M23 qui se rendaient au Rwanda pour des réunions.
Soutien du Rwanda aux opérations militaires du M23
Des déserteurs du M23 et des civils habitant près de la frontière rwando-congolaise ont fait état d'un accroissement de l'appui apporté par le Rwanda au M23 ayant coïncidé avec trois périodes récentes de violents combats – pendant des combats internes entre deux factions du M23 en mars; pendant des affrontements entre le M23 et l'armée congolaise près de Mutaho à la fin mai; et avant les combats de la mi-juillet au nord de Goma.
Après la scission du M23 en deux factions, les autorités rwandaises ont soutenu la faction commandée par Sultani Makenga contre celle de Bosco Ntaganda. Un ancien officier du M23 appartenant à la faction Makenga a déclaré à Human Rights Watch: « Le Rwanda nous a sauvés et c'est grâce à son soutien que nous avons pu battre le groupe de Ntaganda. Ils nous a envoyé des munitions et des troupes bien armées.»
Un jeune Congolais a indiqué à Human Rights Watch que plusieurs jours avant que des combats n'éclatent près de Mutaho fin mai, des combattants du M23 l'avaient enlevé dans le groupement de Kibumba à la mi-mai. Ils l'avaient emmené de l'autre côté de la frontière, au Rwanda, où ils avaient rencontré un groupe de militaires rwandais. Avec d'autres qui l'accompagnaient, il avait alors été forcé de porter des bidons de lait et des caisses de munitions et de repartir à pied en RD Congo en compagnie des soldats et des combattants rebelles.
Un étudiant congolais âgé de 19 ans, recruté de force par le M23 en mars, a indiqué à Human Rights Watch qu'en compagnie d'autres combattants du M23, il avait été emmené au Rwanda à la mi-mai pour prendre livraison d'armes et de munitions et les rapporter au M23 en RD Congo. Ils ont franchi la frontière du Rwanda à Gasizi et le lendemain matin, ils ont rapporté les armes et les munitions à Kibumba, en RD Congo. « Les armes étaient arrivées dans deux camions», a-t-il dit. « Nous avons déchargé de petites bombes, des mitrailleuses, des cartouches et des lance-roquettes. D'autres Rwandais se sont joints à nous [à Gasizi] pour nous aider à porter les armes à Kibumba.»
De nombreux habitants de la région, qui se trouvaient à proximité de la frontière entre le 19 et le 23 mai, ont affirmé à Human Rights Watch avoir vu des groupes d'hommes armés en uniforme traverser la frontière du Rwanda vers la RD Congo, notamment à Kasizi, à Kabuhanga, et sur la colline de Hehu.
Le 20 mai, par exemple, un enseignant de Kasizi, qui habite près de la frontière, a vu trois camions arriver vers 17h00. De nombreux hommes armés portant des uniformes militaires rwandais, sur lesquels figurait le drapeau rwandais, sont descendus des camions et ont franchi la frontière vers la RD Congo à pied, à travers la forêt, juste à côté du point de passage frontalier officiel.
Un résident a déclaré à Human Rights Watch avoir vu, le 21 mai vers 11h00, au moins plusieurs dizaines de soldats vêtus d’uniformes sur lesquels le drapeau rwandais était visible au niveau de l’épaule, au marché de Ruhunda à Kibumba en RD Congo, marchant en file indienne. Ils étaient armés et certains portaient des caisses. Certains, qui semblaient être de rang supérieur, étaient munis de walkie-talkies.
Human Rights Watch a également recueilli des informations concernant une augmentation des mouvements d'hommes armés du Rwanda vers la RD Congo pendant les jours ayant précédé les combats qui ont éclaté le 14 juillet.
Un paysan a dit à Human Rights Watch qu'au soir du 10 juillet, alors qu'il rendait visite à un parent qui habite près de la frontière rwandaise dans le groupement de Kibumba, il a entendu des moteurs de véhicules, a regardé par la fenêtre et a vu des hommes armés en uniforme venant de la frontière et se rendant vers Kibumba. Certains étaient à pied, d'autres à bord de véhicules.
Un paysan vivant du côté rwandais de la frontière a déclaré avoir observé entre le 7 et le 11 juillet, toujours dans la soirée, des mouvements de camions similaires amenant des militaires vers la position de l'armée rwandaise à Njerima. Les hommes descendaient des camions à la frontière et passaient en RD Congo à pied.
Un autre civil rwandais habitant près de la frontière, dans le secteur de Rubavu, a raconté à Human Rights Watch que des officiers de l'armée rwandaise l'avaient convoqué, ainsi que d'autres riverains, à une réunion début juillet. Un capitaine de l'armée rwandaise qui présidait la réunion a affirmé aux personnes présentes que les FDLR se trouvaient à proximité de la frontière. « Au lieu de laisser la guerre venir au Rwanda, nous allons la porter de l'autre côté», a-t-il dit.
Quatre jours plus tard, le même civil rwandais a vu des centaines de militaires rwandais franchir la frontière vers la RD Congo, lourdement armés. « Certains avaient des armes lourdes, qui se démontent et nécessitent trois hommes pour porter toutes les pièces», a-t-il dit. « D'autres portaient des mortiers. La plupart étaient à pied mais ils ont aussi utilisé deux camions recouverts de bâches.»
Cet homme a affirmé avoir vu un autre mouvement important de troupes rwandaises franchir la frontière de la RD Congo le 8 juillet, une semaine avant que n'éclatent des affrontements entre le M23 et l'armée congolaise. Au cours de la semaine suivante, il a vu des groupes plus réduits de militaires passer en territoire congolais.
Un paysan rwandais vivant près du village de Kabuhanga a affirmé avoir vu des groupes de plusieurs dizaines de militaires rwandais pénétrer en territoire congolais entre le 20 et le 30 juin. Il a aussi vu un groupe plus nombreux passer le 12 juillet, deux jours avant le début des combats.
Exactions commises par les milices hutues soutenues par des militaires congolais
Le contrôle exercé par le M23 sur certains territoires s'est trouvé affaibli du fait des affrontements entre deux factions du mouvement en mars. Depuis lors, des groupes armés hutus congolais, dont le Mouvement populaire d’autodéfense (MPA), ont perpétré des attaques dans et aux alentours de territoires contrôlés par le M23 et ont tué ou violé plusieurs civils. Des responsables de l'ONU et d'anciens miliciens hutus ont indiqué à Human Rights Watch que certaines factions de ces groupes avaient reçu un appui de la part de membres de l'armée congolaise.
Une jeune fille de 16 ans a déclaré à Human Rights Watch que le 17 juin, elle avait été victime d’un viol collectif, avec deux autres jeunes filles et une femme plus âgée, par plusieurs miliciens hutus, alors qu'elles revenaient chez elle après des travaux agricoles dans le territoire de Rutshuru. En juin, des combattants du MPA ont tué le chef coutumier local à Buchuzi, dans le groupement de Busanza, ainsi que deux policiers du M23. Les combattants ont accusé le chef de faire du recrutement pour le compte du M23. Cette attaque a fait suite à un accrochage le 6 juin, lors duquel des combattants du M23 ont attaqué le MPA et pillé 12 maisons et volé des dizaines de chèvres.
Certains de ces groupes hutus congolais sont alliés aux FDLR, qui ont longtemps perpétré de terribles exactions contre les civils dans l'est de la RD Congo, dont des meurtres et des viols. Selon des sources interrogées par le Groupe d'experts de l'ONU et citées dans le rapport intérimaire du Groupe qui a fait l'objet d'une fuite en juin, des militaires de l'armée nationale congolaise ont fourni des munitions aux FDLR et des officiers locaux de cette armée opérant près des territoires contrôlés par le M23 «rencontrent régulièrement et échangent des informations opérationnelles» avec des commandants des FDLR.
Éléments de contexte sur le M23 et sur les récents combats
Le M23 a été formé en avril 2012 à la suite d'une mutinerie d'anciens membres d'un autre groupe rebelle congolais soutenu par le Rwanda, le Congrès national pour la défense du peuple (CNDP), qui avaient été intégrés dans l'armée congolaise en 2009. Jouissant d'un important soutien de la part de l'armée rwandaise, le M23 a pris le contrôle de la majeure partie des territoires de Rutshuru et Nyiragongo dans la province congolaise du Nord Kivu. Fin novembre, le M23 s'est emparé de la principale ville de l'est de la RD Congo, Goma, là encore grâce à un important appui militaire rwandais. Le M23 s'est retiré de Goma le 1er décembre, lorsque le gouvernement congolais a accepté d'ouvrir des pourparlers de paix.
Le 24 février, 11 pays africains ont signé l'Accord-Cadre pour la paix, la sécurité et la coopération pour la République démocratique du Congo et la région à Addis-Abéba, sous les auspices du Secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon. Les pays signataires – dont la RD Congo et le Rwanda – sont convenus de ne pas s'ingérer dans les affaires intérieures des Etats voisins; de ne pas tolérer ni fournir une assistance ou un soutien quelconque à des groupes armés; de ne pas héberger ni fournir une protection de quelque nature que ce soit aux personnes accusées de crimes de guerre, de crimes contre l'humanité, d'actes de génocide ou de crimes d'agression, ou aux personnes sous le régime de sanctions des Nations Unies; et de faciliter la coopération régionale en matière de justice. L'ancienne présidente de la République d'Irlande, Mary Robinson, a été nommée Envoyée spéciale du Secrétaire général de l'ONU pour la région des Grands Lacs, afin de soutenir la mise en œuvre de l'Accord-Cadre.
Le 18 mars, Bosco Ntaganda, l'un des principaux chefs du M23, s'est rendu à l'ambassade des États-Unis à Kigali, la capitale du Rwanda, à la suite de sa défaite lors d'affrontements entre deux factions rivales du M23. Il a été transféré à La Haye, où il doit répondre d'accusations de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité devant la Cour pénale internationale. Plus de 700 combattants et dirigeants politiques du M23 fidèles à Ntaganda ont eux aussi fui au Rwanda, dont quatre hommes qui figurent sur la liste des personnes sous le coup de sanctions des Nations Unies et des États-Unis: Innocent Zimurinda, Baudouin Ngaruye, Éric Badege, et Jean-Marie Runiga.
Zimurinda et Ngaruye ont été impliqués dans des massacres ethniques, des viols, des actes de torture et des recrutements d'enfants. Ils ne devraient pas être mis à l'abri de la justice mais au contraire arrêtés et traduits en justice sans retard, a déclaré Human Rights Watch.
Makenga et Kayna (alias « India Queen »), qui se trouvent toujours en RD Congo, figurent également sur la liste des personnes frappées de sanctions par l'ONU et les États-Unis, et ils font aussi l'objet de mandats d'arrêt émis par la RD Congo pour crimes de guerre et crimes contre l'humanité.
Les pourparlers de Kampala, en Ouganda, entre le gouvernement congolais et le M23, ont fait peu de progrès. Le gouvernement congolais a insisté sur le fait qu'il refusera d’intégrer au sein de ses forces armées ou de récompenser toute personne impliquée dans de graves violations des droits humains, notamment celles qui sont sous le coup de sanctions des Nations Unies. Offrir des postes de responsabilité à des violateurs des droits humains ne peut qu'encourager à commettre de nouvelles exactions et constitue un affront aux victimes des abus commis dans le passé, a rappelé Human Rights Watch.
Après le retrait du M23 de Goma en décembre, un cessez-le-feu entre ce mouvement et l'armée congolaise a été globalement respecté jusqu'à ce que de violents combats reprennent dans les alentours de Mutaho, à huit kilomètres au nord-ouest de Goma, du 20 au 22 mai.
Les affrontements entre le M23 et l'armée congolaise ont repris le 14 juillet au nord de Goma.
Depuis sa scission en mars, le contrôle qu'exerce le M23 sur certaines zones s'est affaibli, ce dont les FDLR et les groupes hutus congolais qui sont leurs alliés ont profité pour y effectuer des incursions.
Une nouvelle Brigade d'intervention, une force sous conduite africaine de 3.000 hommes composée de troupes fournies par l'Afrique du Sud, la Tanzanie et le Malawi, est en cours de déploiement dans l'est de la RD Congo. Cette force fait partie de la Mission de maintien de la paix de l'ONU en RD Congo, la MONUSCO, et a pour mandat d'effectuer des opérations offensives contre les groupes armés qui sévissent dans l'est de la RD Congo. Le M23 s'est vigoureusement opposé au déploiement de cette force.
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Au gouvernement rwandais :
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Aux envoyés spéciaux de l'ONU et des États-Unis dans la région des Grands Lacs et aux gouvernements des pays qui fournissent de l'aide au Rwanda et à la RD Congo :