Les travaux préparatoires de la conférence sur la paix, la sécurité et le développement dans les Kivu ont été officiellement ouverts, ce jeudi 27 décembre 2007, à Goma, au cours d’une cérémonie inaugurale présidée par l’Abbé Malu Malu, Président de la Commission électorale indépendante (CEI), également coordonnateur des travaux préparatoires de la Conférence. Ces travaux marque le début d’une campagne de sensibilisation à la base sur les objectifs et les résultats attendus de cette conférence prévue du 6 au 14 janvier 2008.
Quelque 500 personnalités ont participé à cette cérémonie officielle, dont le Président de l’Assemblée nationale, Vital Kamerhe, le Ministre de l’Intérieur, Denis Kalume Numbi, le Gouverneur a.i. du Sud Kivu, Bernard Watunakanza et celui du Nord Kivu, Julien Paluku, ainsi que de nombreux élus nationaux et provinciaux des deux Kivu, représentants des forces vives, notables, et représentants de pays amis de la RDC et organisations régionales et internationales dont le représentant de l’Union européenne, la MONUC et les agences du système des Nations Unies.
Dans son discours liminaire, l’Abbé Malu Malu a expliqué les raisons qui ont poussé au report du lancement de la Conférence proprement dite, initialement prévue du 27 décembre au 5 janvier. Des voix se sont élevées qui ont exprimé des préoccupations par rapport à des questions relatives à la préparation de ces assises, a-t-il dit. Nous les avons entendues. Un report a donc été décidé afin de permettre d’enrichir, si nécessaire, par des propositions constructives, le projet de charte organisationnelle de la conférence préparé à Kinshasa avant l’ouverture officielle des travaux, dorénavant prévu le 6 janvier 2008.
Cette période supplémentaire de préparation sera également mise à profit pour mener une vaste campagne de sensibilisation à la base sur les objectifs et les résultats attendus de la conférence. L’Abbé Malu Malu a, par ailleurs, lancé un appel urgent aux participants des travaux préparatoires pour qu’ils œuvrent, ensemble, à l’élaboration de stratégies et d’action concrètes visant à assurer le plein succès de la conférence et de la mise en œuvre fructueuse des résolutions et recommandations qui en émaneront.
«Si nous voulons assurer le succès de ces assises», a poursuivi l’Abbe Malu Malu, «il est essentiel qu’elles soient inclusives, et que, dans la conduite de nos travaux, nous nous laissions guider par la raison, plutôt que par l’autorité. Chacun doit pouvoir exprimer ses préoccupations, avec franchise et sincérité, sans tabou ».
Le Ministre de l’Intérieur Denis Kalume Numbi a, quant à lui, rappelé que l’idée de cette Conférence était celle du Président de la République, et que cette dernière avait été largement soutenue par le Parlement, et le Gouvernement, qui avait décidé d’allouer un budget de deux millions de dollars pour en rendre la tenue possible.
Le Président de l’Assemblée Nationale, Vital Kamerhe, retraçant les différentes étapes essentielles qui ont marqué le processus de paix en RDC, des Accords de Lusaka en 2002, à la Transition, de 2003 à 2006, aux élections présidentielles, législatives et provinciales, en 2006, a rappelé qu’avant chacune de ces étapes des voix pessimistes s’étaient élevées pour annoncer l’échec de ces processus.
«Nous avons franchi ces caps avec succès. Pourquoi ne passerions nous pas celui-ci avec le même succès? Une bonne diplomatie et une bonne politique peuvent arrêter la guerre», a-t-il dit. «Cette conférence est une chance qui nous est offerte. Nous ne devons pas rater ce rendez vous historique. Pour ce faire, il y a trois pré requis: les débats doivent être sincères, nous devons refuser d’aborder des questions sous prétexte qu’elles sont tabou, et écouter les arguments de l’autre».
A noter qu’en vertu du document préparatoire de la conférence, cette dernière a pour objectifs globaux de mettre fin à la guerre et à l’insécurité dans les provinces du Nord et du Sud Kivu. Elle doit également jeter les bases d’une paix durable et d’un développement intégral dans ces deux provinces.
La mobilisation de toutes les forces vives des provinces des deux Kivu autour des objectifs de la Conférence, l’évaluation des préjudices subis par ces provinces depuis 1994, la dissipation des peurs, des méfiances réciproques, des suspicions, des frustration et des colères qui rendent la cohabitation difficile, et l’établissement de bases d’une véritable réconciliation entre les fils et les filles des Provinces du Nord e Sud Kivu, figurent également parmi les objectifs «spécifiques» de la Conférence.
Pour rappel, le report du lancement de la conférence, initialement prévu pour le 27 décembre, à la date du 6 janvier 2008 a été annoncé le 25 décembre dernier, sur fond d’une importante polémique, en particulier, autour de son processus préparatoire, mais également autour de la question de l’opportunité de telles assises en tant que forum approprié pour régler la crise sécuritaire et humanitaire actuelle dans les Kivu.
Depuis l’annonce de la tenue de la conférence, les représentants de la société civile du Nord et du Sud Kivu, en tête des protagonistes de la contestation, menacent de boycotter la conférence. Motifs avancés: précipitation dans l’organisation de ces assises, jugées inenvisageables alors que les combats se poursuivent et qu’aucun cessez le feu n’est en vue; budget outrancier alloué à l’organisation de cette conférence au regard des besoins urgents des dizaines de milliers de déplacés qui attendent toujours une assistance de première nécessité; manque de consultation de la base au cours du processus préparatoire de la conférence et sous représentation de la société civile dans la liste des participants présentée par les organisateurs.
Jeudi 27 décembre, avant le lancement officiel des travaux préparatoires, une rencontre qualifiée de positive par les parties a eu lieu entre l’Abbé Malu Malu et les représentants de la société civile des deux Kivu. Au terme de cette dernière, la société civile a annoncé qu’elle réservait encore sa décision quant à sa participation à la conférence, mais qu’elle avait remis un cahier des charges au coordonnateur des travaux préparatoires contenant les demandes qu’elles souhaitaient voir retenues pour participer à la conférence.