La Chambre des mises en accusation de Bruxelles rend, dans l'après-midi de ce jeudi 5 juin, son arrêt sur la libération ou non de Jean-Pierre Bemba. Hier mercredi, les bembistes ont livré, devant le Palais de Justice de Bruxelles, un grand concert de casseroles, chanté et manifesté bruyamment leur total soutien inconditionnel au principal opposant au pouvoir de Kabila. Mais l'enthousiasme suscité en fin de semaine dernière par l'action en appel des avocats de Bemba s'est effrité avec les déclarations de l'Ambassadeur du Royaume de Belgique à Kinshasa qui ne reconnaît pas à son pays le pouvoir de s'immiscer dans une procédure judiciaire de la CPI.
Difficile pour les Congolais, en dépit de nombreuses difficultés insurmontables au quotidien auxquelles ils sont confrontés, de passer sous silence les démêlées judiciaires de Jean-Pierre Bemba devant les juridictions occidentales. Le bain de foule que s'est permis le Président Joseph Kabila dans le fief de l'inusable Antoine Gizenga à Bandundu-ville, Kikwit et Kenge a juste été commenté pendant moins de quarante huit heures. Déjà dans la soirée de mardi 3 juin, il n'y avait plus que les médias d'Etat pour y revenir. Hier mercredi, les journaux pro pouvoirs replaçaient au devant de l'actualité l'affaire Bemba. C'est donc réparti. Jean-Pierre Bemba a effectivement comparu devant la Chambre des mises en accusation de Bruxelles. Bemba et ses avocats ont plaidé pour une relaxation. L'argument avancé est que l'inculpé aurait dû se faire assister lors de sa première audition par ses avocats. Comme cela n'a pas été le cas, la procédure légale de l'arrestation du Président du MLC n'a pas été respectée. La Cour d'Appel de Bruxelles n'avait pas encore, au soir d'hier, rendu son arrêt que Kinshasa bruissait des spéculations. Pour certains, les avocats de Bemba ont convaincu les juges belges et que la libération n'était plus qu'une affaire des heures. Les bembistes les plus irréductibles y croient le plus sérieusement du monde. Ils mettent en avant toutes les garanties présentées par leur leader : la présence de sa famille en Belgique, sa résidence à Bruxelles et une importante caution financière. Pour les sceptiques, Bemba n'obtiendra pas la liberté provisoire parce que les crimes lui reprochés sont d'une telle gravité qu'il devait passer un bon moment de sa vie à méditer sur ses actes au fond d'une cellule. Un peu tard dans la soirée, une folle rumeur a circulé dans les maisons cossues de la ville comme quoi Jean-Pierre Bemba serait pris dans son propre piège. On a laissé entendre que les juges belges auraient profité de sa comparution pour se faire une idée de sa fortune. L'objectif, rapporte-t-on, serait de s'assurer que Bemba a de quoi indemniser les victimes des actes de barbarie commis par ses hommes à Bangui. En cas de condamnation bien sûr. C'est ainsi que quelqu'un, apparemment au parfum de tout ce qui se trame au Palais de Justice de Bruxelles, a confié, vrai ou faux cela reste à vérifier, que la question qui posait encore problème était celle de savoir qui assurerait la sécurité de Bemba au cas où il serait remis en liberté. Parce que, poursuit-on, un criminel recherché par la CPI, ne peut évoluer au gré des vagues. Dans les milieux du MLC à Kinshasa, on déclarait que la libération de leur chef n'avait pas de prix. Seule compte pour eux l'alternance au pouvoir actuel que Jean-Pierre Bemba serait le seul à incarner.