Les prévisions n’ont pas été démenties. Si la rentrée parlementaire a effectivement eu lieu tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat, la situation est demeurée tendue. Particulièrement entre Vital Kamerhe, président de l’Assemblée nationale, et sa plate-forme, l’Alliance de la majorité parlementaire, AMP. Ainsi, Vital Kamerhe, seul au perchoir, les autres membres du Bureau et les députés de l’AMP ayant boycotté la séance d’ouverture, n’a pas démissionné. Il a promis toutefois d’inscrire la question à l’ordre du jour de la prochaine conférence des présidents. Vive réaction de l’AMP qui réunissait à son siège tous les députés de l’AMP, quasiment au même moment. Une décision a été prise : motion de déchéance contre Vital Kamerhe, « pour faute lourde ». C’est le bras de fer. Le prélude d’une crise susceptible de perturber le bon fonctionnement des institutions nationales.
« Maintenant que je procède à l’ouverture de cette session de mars 2009, je voudrais rassurer le Président de la république, chef de l’Etat et ma famille politique, que j’inscrirai la question de ma démission et du renouvellement du Bureau à la prochaine réunion de la Conférence des présidents, avant de venir en débattre en plénière, et ce, en conformité avec la Constitution et notre Règlement intérieur». C’est le moment tant attendu du discours de Vital Kamerhe en cette séance d’ouverture de la session parlementaire du mois de mars. Il a voulu demeurer légaliste jusqu’au bout pour « d’abord préserver la démocratie et son artisan, le président Joseph Kabila ; pour ensuite sauver l’honneur et le prestige de l’Assemblée nationale, et pour protéger la loi suprême du pays, la Constitution, et en enfin observer strictement le texte qui régit l’Assemblée nationale, à savoir le Règlement intérieur », a dit Vital Kamerhe.
Auparavant, toujours autour de sa démission et celle des autres membres du Bureau de l’Assemblée nationale, Vital Kamerhe a relevé que « Le mandat du député national n’est pas impératif, conformément à l’ article 101 alinéa 5 de la Constitution qui dispose que tout mandat impératif est nul ». Et de souligner en citant certains auteurs éprouvés : « Le terme mandat impératif doit être entendu comme un acte établissant un rapport de droit entre le mandataire et ou les mandants, tel que le premier se trouve dans leur dépendance étroite. Cette dépendance se traduit par la révocation de l’élu qui ne se conformerait pas aux engagements qu’il a contactés. C’est donc ce mandat impératif que notre Constitution a proscrit », a-t-il souligné.
Tout juste ce qu’il fallait pour susciter « la colère » des responsables de sa famille politique. Quasiment au même moment, l’AMP se réunissait en son siège. Etaient également présents, les députés de cette plate-forme. Au terme de leur réunion, ils ont décidé de déposer une motion de déchéance, avec effet immédiat, contre Vital Kamerhe, pour faute lourde. 301 des 320 députés nationaux de l’AMP ont signé cette motion. Il n’y a plus autre chose à dire : le bras de fer est engagé entre Vital Kamerhe et l’AMP.
Le droit contre la politique
La partie s’annonce intéressante. D’un côté, Kamerhe qui se veut légaliste pour faire triompher les principes du droit, de l’autre, l’AMP convaincue que devant certaines circonstances, la politique peut avoir le dessus sur l’intransigeance du droit.
Certes, ce qui est peut-être vrai. Mais est-il que toute logique politique finit toujours par s’inscrire dans un contexte juridique pour lui conférer une substance. Tel le cas de cette « motion de déchéance » pour que Vital Kamerhe perde également son mandat de député. Cette motion doit obéir aux prescrits du règlement intérieur de l’Assemblée nationale dont la conformité a été attestée par la Cour suprême de Justice. Donc, une Loi, publiée dans le Moniteur Congolais à l’instar de toutes les autres lois de la RDC.
Si le bras de fer se poursuit, cela risque de ressembler à une « querelle de clochers » susceptible de déboucher sur une « crise politique ». Ce qui porterait ainsi un coup dur au bon fonctionnement des institutions nationales. Qui gagnera en ce moment ? C’est la question fondamentale. De toute façon, ce ne serait pas le peuple congolais.
Une interrogation qui appelle à l’intervention rapide du Président de la République pour ramener de l’ordre dans sa famille politique de manière à ne pas perturber le bon fonctionnement des institutions nationales. Car même si la décision de dissoudre le Parlementaire pourrait intervenir, elle ne serait que suicidaire pour toute la classe politique actuelle. N’ayant pas encore accompli son « contrat électoral », elle aura difficile à tenir un bon discours politique.
L’heure est cruciale. Moment idéal pour le président de la République, garant de la Nation et de la Constitution, d’arrêter ce « mauvais théâtre de chez nous ». D’imposer la «sagesse politique » à toutes les parties pour éviter tout débordement. Il y a bien d’enjeux plus importants que cette querelle de clochers.
Il s’agit de consolider la paix, de renforcer la démocratie, de mener avec efficacité la lutte contre la pauvreté, l’analphabétisation, la mauvaise gouvernance, le chômage, la délinquance juvénile et sénile…. Autant de grands défis à relever dans le cadre de la refondation d’un Etat moderne et démocratique.