Le Mouvement de libération du Congo (MLC), deuxième force politique institutionnelle de la RDC, est aujourd’hui en proie à une crise d’une ampleur jamais égalée auparavant. Déchu le 18 avril 2011 de ses fonctions de secrétaire général par le Collège des fondateurs, François Muamba a décidé de porter l’affaire devant le Tribunal de Grande Instance de Kinshasa/Gombe « pour faire constater la nullité de cette décision ». Dans la foulée, il revendique le droit d’être « directeur de campagne » du candidat Jean-Pierre Bemba à l’élection présidentielle. Véritable guerre des tranchées au sein du MLC.
Le Mouvement de libération du Congo (MLC) va mal. Tellement mal que des membres du Collège des fondateurs vont répondre devant la justice de leur dernière « décision de déchéance » du secrétaire général, François Muamba Tshishimbi – du reste député national sous les couleurs du même parti.
Même défenestré du MLC, François Muamba ne s’avoue pas vaincu. Une fois de plus, il s’est offert hier mercredi à la presse pour défendre sa position, réaffirmant toujours son attachement au MLC.
« Après mûre réflexion, je me suis, malgré moi, résolu depuis quarante-huit heures, avec l’appui de sept autres collègues membres du Collège des fondateurs du MLC, de porter cette triste affaire devant le Tribunal de Grande Instance de Kinshasa/Gombe, enrôlée sous le numéro RC 105064, pour faire constater la nullité de cette décision illégale et celle d’autres actes posés dans la foulée », a annoncé l’intéressé le mercredi 14 mai à Kinshasa, au cours d’une conférence de presse à l’hôtel Sultani.
En conséquence, il demande aux institutions de la République, à la classe politique, aux partenaires nationaux et internationaux ainsi qu’aux structures et aux militants du parti de « prendre acte de la procédure judiciaire ainsi engagée, dont le corollaire est que les textes qui régissent le MLC restent d’application jusqu’à la conclusion de cette action en justice».
« En substance, et en conformité avec les articles 46 et 48 des Statuts du MLC, la seule personne habilitée à engager le parti demeure le secrétaire général que je suis », a-t-il affirmé. En plus, argue-t-il, l’article 46 du parti, dont il se réclame encore être le secrétaire général, dispose qu’« en cas d’empêchement du président, ses fonctions sont exercées par le secrétaire général. Le président peut déléguer une partie de ses compétences à ce dernier ». Et aux termes de l’article 48, « le secrétaire général a pour mission, entre autres, d’assurer l’intérim du président national en cas d’empêchement », a rappelé François Muamba, soutenant que « ces dispositions sont donc de rigueur et opposables à tous ».
« RACINES » DE LA CRISE
Selon François Muamba, « c’est une litote que d’affirmer que le MLC, cette belle machine politique que notre peuple a porté sur les fonts baptismaux depuis 2006, en tant que deuxième force politique du pays, est aujourd’hui en proie à une crise d’une ampleur jamais égalée auparavant ».
A son avis, « cette situation trempe certainement ses racines dans les convulsions politiques consécutives à l’atterrissage, pour le moins mouvementé, du processus électoral de 2006 et à l’éloignement de la scène politique et à l’éloignement de la scène politique du président national du parti, le sénateur Jean-Pierre Bemba, aujourd’hui détenu à La Haye ».
Dans le développement de cette crise qui prenait de plus en plus d’ampleur avec le temps, il y a eu la perte par l’opposition d’un levier de combat aussi important que la désignation de son porte-parole, conformément à la loi. « La cause de cette défaillance, il faut le dire, est entièrement imputable à l’absence de confiance qui minait déjà le sommet de la direction du MLC », a-t-il reconnu.
Toutefois, « ces derniers jours, deux faits majeurs sont venus accélérer cette crise qui couvait ainsi depuis pratiquement depuis quatre ans », a-t-il noté, citant « d’abord » l’initiative – prise par 23 députés nationaux du MLC- d’adresser le 30 mars 2011 un Mémorandum interpelant la Direction du parti. « En résumé, ces hauts cadres sollicitaient, en cette veille des échéances électorales, la convocation du deuxième Congrès du MLC, en vue de placer le parti en ordre de bataille et de désigner ses candidats à tous les niveaux, y compris à l’élection présidentielle », a-t-il révélé.
Ensuite, a-t-il ajouté, « il s’agit de l’initiative précipitée de certains collègues, membres fondateurs du parti qui, au lieu d’adhérer à cette démarche somme toute salutaire ont, en date du 18 avril dernier, opéré une fuite en avant en prétendant procéder, en toute illégalité, à la destitution du Secrétaire général du parti et, par voie de conséquence, ont voulu chambarder les structures du MLC ».
Disant « partager totalement » les « préoccupations » des signataires du mémorandum du 30 mars 2011, François Muamba a, « prenant la mesure du temps et de l’urgence », annoncé sa « volonté de convoquer dans les tout prochains jours un Congrès ordinaire, dans les formes requises par les textes qui régissent le MLC, de manière à soumettre entre autres, aux débats et délibérations des congressistes, les différents points pertinents soulevés dans le Mémorandum et de désigner les candidats qui vont porter ses couleurs à tous les niveaux des compétitions électorales annoncées pour se tenir de 2011 à 2013 ».
Le Congrès du MLC permettra également de dresser son bilan des cinq dernières années, tant au regard de son projet de société que de ses structures, et d’évaluer l’action du parti face aux attentes et autres aspirations du peuple congolais, qui sont sa véritable raison d’être.
« RECONCILIER TOUS LES ENFANTS » DU MLC
« De l’Accord de Lusaka en 1999 aux élections générales de 2006, en passant par le Dialogue inter-congolais de Sun City et la transition politique, le MLC a, d’une manière pérenne, été une force motrice qui a contribué d’une manière significative à construire la, paix, la concorde nationale et la bonne gouvernance, comme mécanismes devant servir au mieux le peuple congolais », a rappelé François Muamba. Assurant que « cette posture du MLC sera maintenue et amplifiée ».
Il a promis de « peser » de tout son poids lors du futur Congrès « pour que le MLC réconcilie tout d’abord ses propres enfants, aujourd’hui éparpillés dans différentes autres structures, sans jamais avoir renié le projet de société qui les avait naguère mis ensemble ». Ayant toujours prôné par me passé le rassemblement des forces positives politiques et civiles, le MLC veut « amener le parti à s’ouvrir davantage aux ressources humaines nouvelles, gage de l’enrichissement de ses idées et de son action » pour parvenir à réaliser ses objectifs.
A propos du calendrier électoral rendu public par la CENI le 30 avril 2011, il a déclaré que « le MLC, solidaire de l’ensemble de l’opposition politique, est partie prenante à la position que toute l’opposition étudie et va publier dans les heures qui viennent ».
Toutefois, il s’est « réjoui de constater que les revendications substantielles émises par l’opposition lors des consultations conduites par le président de la CENI ont été prises en compte ; à savoir, le maintien du couplage de l’élection présidentielle et des élections législatives d’une part et, d’autre part, le respect des délais constitutionnels ».
Co-rédacteur des Statuts du MLC avec d’autres camarades, a-t-il révélé, tels qu’Olivier Kamitatu qui ont quitté le navire, François Muamba a dit qu’il «revendique le droit » de conduire la campagne du sénateur Jean-Pierre Bemba, président national du parti, à la présidentielle de 2011.
« Le sénateur Jean-Pierre Bemba, par ailleurs président national du MLC, est en situation d’être candidat président de la République. Je revendique le droit d’être son directeur de campagne », a-t-il encore annoncé, coupant court à toute forme de rumeur de son divorce avec le chairman du MLC, toujours incarcéré à la Cour pénale internationale pour des crimes commis en 2003 par ses troupes sur le sol centrafricain.
Ainsi, au MLC, où depuis un temps, c’est Thomas Luhaka qui engage le parti en qualité de secrétaire général a.i., rien n’est encore joué. C’est finalement devant la justice que devait se dénouer le litige qui divise les membres du collège des fondateurs du MLC.