Le Représentant Spécial du Secrétaire général des Nations unies en RDC, William Swing, s'est exprimé sur la conjoncture politique au cours de la conférence de presse hebdomadaire de la MONUC à Kinshasa, le Mercredi 02 août 2006.
Je voudrais partager avec vous quelques-unes de nos impressions sur les élections qui se sont déroulées le dimanche dernier.
Je voudrais d'abord vous remercier, vous les hommes de medias, de la presse pour votre fidélité, et votre intérêt au processus en informant régulièrement le grand public. On vient de vivre quelque chose d'historique avec la tenue des élections multipartites le dimanche 30 juillet dernier.
C'est une grande chose pour le peuple congolais. Nous voulons ici, lui témoigner notre reconnaissance pour l'esprit dont il a fait preuve. Pour cette raison, nous rendons hommage au peuple congolais qui a voté massivement, dans la paix, le calme, avec patience et dignité en un seul jour.
Le taux de participation a été très élevé dans presque tout le pays, grâce à un climat de sécurité, à l'exception du Kasaï. J'ai surtout remarqué la forte mobilisation des femmes. Je voudrais saluer aussi ici la présence des 1700 observateurs internationaux. Celle des 47000 observateurs nationaux et des 300.000 témoins des partis politiques.
Tout s'est passé dans une atmosphère de sécurité, de calme, et comme je vous l'ai dit sans incidents majeurs. Il y a eu 49.947 bureaux de vote, dont la grande majorité a ouvert à temps. Les bureaux qui ont ouvert avec du retard, ont pu fermé plutard. Il y a eu seulement des problèmes techniques mineurs comme l'incendie volontaire de matériels électoraux et de bureaux de vote dans le Kasaï.
Les élections de dimanche ont un caractère historique qui va marquer l'aboutissement de la transition initiée en RDC depuis 2003, pour un pays en transition depuis 15 ans. Je me réjoui du calme et la sérénité dans lesquelles se sont déroulées ces élections. Je me réjoui également des bonnes conditions dans lesquelles la campagne électorale s'est globalement déroulée. Je voudrais féliciter encore une fois le peuple congolais pour sa patience, son dévouement, son courage et sa détermination ainsi sa foi en l'avenir de ce pays.
Nous, aux Nations Unies et je crois que c'est le cas de tous les autres membres de la communauté internationale, nous sommes très honorés d'avoir été associés à la grande entreprise qu'ont été ces élections au Congo. Vous serez peut-être surpris, mais ce sont les plus grandes jamais soutenues par les Nations Unies, en prenant en compte trois aspects.
Premièrement, c'est le plus grand pays de loin - un tiers des Etats-Unis, aussi grand que l'Europe des quinze et plus grand que les cinq ou six pays qui ont organisé des élections au cours de ces trois ou quatre derniers mois.
Deuxièmement, en RDC, nous avons eu le plus grand électorat avec plus de 25 millions d'électeurs, c'est-à-dire de cinq millions de plus qu'en Afrique du Sud.
Enfin, organiser les élections était un grand défi dans un pays qui n'a que 500 km de routes. Un pays qui n'a pas recensé sa population depuis 1984 et enfin un pays qui n'a pas connu d'élections multipartites depuis 1965. En plus, la RDC avait besoin de 50.000 bureaux de vote. Il y avait d'autres défis encore'
Malgré tout, nous, à la MONUC, nous avons été toujours optimistes. Sur quoi donc était basé cet optimisme' Je répondrai en m'appuyant sur trois choses:
Premièrement, comme je l'ai déjà dit, nous avons été marqués par la détermination du peuple congolais de choisir, dans la sérénité, la paix et le calme, ses dirigeants. Il y a un proverbe congolais que vous connaissez et prononcez mieux que moi en Lingala, qui traduit la sagesse congolaise. Et ce proverbe dit ' que si '' le poisson vous dit que le crocodile est malade, il faut le croire parce qu'ils viennent tous de l'eau''. Nous avons écouté le peuple congolais.
La seconde raison de note optimisme se fonde sur le grand soutien de la communauté internationale depuis l'indépendance de ce beau pays et grand pays.
La troisième raison, c'est l'état des préparatifs et le travail remarquable accompli par la Commission électorale indépendante. Le peuple congolais a fait un grand pas depuis le referendum en exprimant sa volonté de rompre avec une histoire de 15 ans d'interminables transitions et de négociations politiques avec ces élections.
C'est dommage que l'attention du grand public ait toujours été focalisée sur la campagne présidentielle alors qu'il y avait aussi une campane pour élire le parlement, qui sera composé de 500 membres qui auront à choisir le Premier ministre. Et il y aura aussi les Assemblées provinciales qui vont choisir, elles, les Sénateurs.
Si tout s'est bien passé, il faut reconnaître cependant que le reste du chemin est encore long, même si un grand pas a été fait. Nous partageons la préoccupation de la Commission électorale indépendante et de la Haute autorité des medias concernant le comportement de certains medias et certains acteurs qui se livrent, depuis 24 heures et je cite «à la violation flagrante de la loi électorale, en matière de publication des résultats», fin de citation.
Ces deux instituions nous rappellent dans le même communiqué que la loi électorale autorise la CEI à ne publier que des résultats provisoires. Il faut savoir distinguer les irrégularités des fraudes. Ceux qui ont des contentieux peuvent les porter devant les autorités compétentes, nommées par la loi électorale.
En attendant les résultats et le règlement des contentieux, il est dans l'intérêt du peuple et du processus de garder sa patience et son calme. Dans l'intérêt supérieur de la nation, il faut résister à la tentation de proclamer unilatéralement et précipitamment sa victoire. Et éviter de proclamer la fraude avant que la Cour suprême de justice et la CEI n'aient fait leur travail et assumé leur responsabilité au regard de la loi.
En attendant, il faut les laisser faire leur travail. Il ne faut pas avoir peur de bonnes nouvelles - le fait que le Congo ait organisé des élections. Surtout, il faut respecter le choix du peuple exprimé dans les urnes.
Finalement, nous disons que le dimanche 30 juillet a été une grande journée pour le peuple congolais qui a été voté. Et je suis convaincu que le bon aboutissement de ces élections va apporter beaucoup de bonnes choses à l'Afrique tout en entière. Il faut un pays stable au centre de l'Afrique. Ces élections ouvrent les portes d'une grande économie dans l'intérêt du peuple congolais.
Je finis par une citation de Monsieur Mandela qui a toujours dit qu'on a ''l'impression d'être en contact physique avec son histoire''. Merci.