KINSHASA (AFP) - Un second tour de l'élection présidentielle en République démocratique du Congo (RDC) devra départager le président Joseph Kabila et le vice-président Jean-Pierre Bemba, selon les résultats annoncés dimanche soir par la Commission électorale indépendante (CEI), alors qu'un militaire a été tué dimanche à Kinshasa. Le président sortant obtient 44,81% des voix contre 20,03% à M. Bemba, selon la CEI.
L'opposant historique Antoine Gizenga arrive en troisième position avec 13,06% des voix, suivi de Nzanga Mobutu (4,77%), le fils du dictateur zaïrois, et d'Oscar Kashala (3,46%), un médecin récemment revenu des Etats-Unis. Le taux de participation à ce premier scrutin libre et pluraliste depuis plus de 40 ans dans l'ex-Zaïre est de 70,54%.
Ces résultats de la CEI doivent être validés par la Cour suprême de justice (CSJ), en charge du contentieux électoral. Les candidats ont trois jours à compter de lundi pour déposer un éventuel recours qui doit être examiné dans les 7 jours par la CSJ.
Dimanche en fin d'après-midi, des tirs nourris ont été entendus dans le centre de Kinshasa, faisant monter la tension à quelques heures de l'annonce des résultats provisoires nationaux du premier tour de scrutin par la CEI.
"Il y a eu des tirs aux abords du siège du MLC (Mouvement de libération du Congo, parti de M. Bemba). Des éléments de la garde présidentielle sont arrivés très vite et il y a eu un échange de coups de feu nourris", a indiqué Moïse Musangana, chargé de communication de M. Bemba. Une source militaire occidentale et une autre source à la Mission de l'Onu en RDC (Monuc) ont confirmé la mort d'un garde du MLC et fait état d'au moins six blessés, notamment parmi les policiers, au cours d'échanges de tirs devant le siège du MLC mais aussi dans d'autres quartiers du centre de la capitale.
Plusieurs blindés de l'armée congolaise ont pris position dans la ville, aux abords du siège du MLC, selon M. Musangana, et sur le grand boulevard de Kinshasa, selon un journaliste de l'AFP. De son côté, la Monuc a déployé 13 blindés légers devant le siège de la CEI.
Le résultat annoncé par la Commission électorale est conforme aux prévisions des experts électoraux prédisant un second tour entre les deux ex-belligérants de la dernière guerre en RDC (1998-2003), aucun des deux n'ayant atteint le seuil de 50% des suffrages exprimés, nécessaires pour être élu dès le premier tour.
Les dernières données compilées par ces experts internationaux portent sur 168 des 169 circonscriptions électorales du pays."Le camp Kabila accepte très mal la perspective d'un second tour. Un second tour, c'est l'inconnu, cela fait peur", a déclaré un expert électoral.
"Il est très difficile de dire qui tire et pourquoi les tirs ont commencé. Plusieurs versions circulent. On parle d'échauffourées avec des shégués (enfants des rues), de provocation de militaires dont on ne sait pas s'ils sont affectés à la garde présidentielle ou à celle de Bemba", a indiqué une source proche de la direction de la police, sous couvert de l'anonymat.
Les tirs ont cessé vers 21H00 GMT mais la situation restait très tendue après près de trois heures d'échanges sporadiques de tirs dans différents quartiers du centre de la capitale.
Les résultats définitifs du premier tour devraient être proclamés par la Cour suprême de justice au plus tard le 31 août, après examen d'éventuels contentieux. La CEI a fixé au 29 octobre la date d'un éventuel second tour.
Plusieurs candidats qui arrivent en queue de peloton, ont déjà dénoncé des fraudes et irrégularités massives. De leur côté, les observateurs nationaux et internationaux, qui ont souligné le bon déroulement du scrutin, ont déploré des "défaillances" dans le processus de récolte et compilation des résultats.
L'élection présidentielle du 30 juillet, combinée avec des législatives à un seul tour, avait été placée sous la surveillance de près de 80.000 policiers, 17.600 Casques bleus de l'Onu et un millier de soldats européens, mandatés pour intervenir en cas de "troubles graves".
Ces scrutins, qui seront suivis d'élections provinciales et locales, doivent mettre un terme à la fragile transition politique, commencée en 2003 après une guerre régionale de près de cinq ans, qui a fait 300.000 morts directs et plus de 3 millions de morts indirects.