« Quand le Congo se réveillera, l’Afrique s’éveillera ». Cette prophétie est d’un sage et intellectuel africain. Les événements sont en train de replacer la République démocratique du Congo sur l’orbite. Après le sommet extraordinaire de la CEEAC à Kinshasa sur la situation au Tchad, le chassé-croisé diplomatique des hautes personnalités étrangères, particulièrement celle de la secrétaire d’Etat américaine, du directeur général du FMI, du président de la Banque mondiale et la réunion des gouverneurs des Banques centrales africaines ; c’est maintenant le tour du sommet de la SADC, (Communauté pour le développement de l’Afrique australe), de tenir ses assises à Kinshasa. Autant d’opportunités qui doivent permettre à la République démocratique du Congo de rebondir sur le plan régional, de signer son grand retour en Afrique.
Du 02 au 08 septembre 2009, se tiendra à Kinshasa le 29ème sommet de la SADC (Communauté pour le développement d’Afrique australe). Il est reparti en trois segments, la première phase prévue, du 2 au 4 septembre, sera consacrée à la réunion des experts, suivie de celle des ministres ; du 5 au 6 septembre, tandis que les chefs d’Etat et de gouvernement se réuniront du 7 au 8 septembre à la Cité de l’Union africaine.
Le sommet sera marqué par l’examen des points suivants : les implications de la crise économique sur la région, l’évolution politique, militaire et sécurité, les questions liées aux commerces, industries, finances et investissements, les problèmes relatifs aux infrastructures, en particulier ceux liés à l’alimentation, l’agriculture, la conservation de la nature, le changement climatique, et enfin les stratégies régionales pour combattre le VIH et autres maladies endémiques.
Créée en I980 par neuf Etats, à savoir : Angola, Botswana, Lesotho, Malawi, Mozambique, Swaziland, Tanzanie et Zimbabwe, la SADC compte aujourd’hui 15 pays membres après l’adhésion de la Namibie, l’Afrique Sud, l’Ile Maurice, République démocratique du Congo, la Madagascar et les Seychelles. La RDC, il y a lieu de le noter, a rejoint le groupe le 8 septembre 1997. Les objectifs de la SADC consistent à réaliser le développement et la croissance économique, alléger la pauvreté, mettre en valeur le niveau et la qualité de la vie des peuples australes et assister les désavantagés sociaux par l’intégration régionale, promouvoir les valeurs communes de démocratie, de respect de l’ Etat de droit, consolider les institutions républicaines, favoriser et défendre la paix et la sécurité, favoriser le développement durable sur la base de l’ interdépendance des Etats membres, réaliser la complémentarité entre les programmes nationaux et régionaux, favoriser et maximiser l’ emploi et l’ utilisation des ressources de la région, s’assurer que les atouts de la forêt, de l‘eau et des ressources naturelles remplissent de façon équilibrée leurs fonctions écologiques, économiques, sociales et communautaires, enfin renforcer et consolider les affinités de longue date et les liens historiques, sociaux, et culturels parmi les peuples de la région.
LEADERSHIP REGIONAL
Les points à examiner et les objectifs d’une telle communauté soulignent, si besoin en est encore, toute son importance dans ce processus de l’établissement d’un Etat moderne et fort. En effet, c’est grâce à son appartenance à la SADC que la République démocratique du Congo a bénéficié de l’assistance militaire du Zimbabwe, de la Namibie et de l’Angola. N’eut été la présence militaire de ces pays amis, la RDC continuerait à subir.
Aujourd’hui qu’il est question de favoriser l’intégration économique régionale, la RDC, de par sa position géostratégique, ses immenses ressources, est à même de jouer un rôle de premier plan et en tirer profit pour son développement. Au fait, outre la SADC, il y a également la Communauté économique des Etats d’Afrique centrale, CEEAC, et la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs, CIRGL. Si on analyse attentivement les objectifs de ces trois communautés, on se rend à l’évidence qu’ils se recoupent. Et fait extraordinaire, la République démocratique du Congo se trouve au centre de toutes les actions.
Il s’agit là « d’une position naturelle » et qu’il revient à la RDC, disons à ses dirigeants, d’en saisir la portée exacte pour agir et réagir en conséquence. En d’autres termes, la CEEAC, la CIRGL et la SADC demeurent incontestablement des « outils de travail régional » pour la République démocratique du Congo. C’est dire qu’ on ne peut construire la CEEAC, la CIRGL et la SADC sans la République démocratique du Congo, tant il est vrai qu’ outre sa position sur le plan géographique, politique, le Congo dispose d’un marché important. Il est le carrefour pour « réunir » l’Afrique de l’Est à celle de l’Ouest, du Nord et du Sud, en passant toujours par l’Afrique centrale. La RDC est incontournable. Il faut le savoir, le comprendre et se mettre en exergue.
Or, pour jouer le rôle de leadership, il y a des préalables. D’abord, disposer des hommes dotés d’une vision régionale des questions majeures. Ensuite des cadres compétents qui ont la maîtrise des dossiers. Enfin, honorer ses engagements.
Sur ce dernier point, la RDC manifeste de graves insuffisances. Elle accuse du retard quant à sa participation au processus d’intégration économique régionale. Notamment, la non signature du « Protocole commercial » qui est justement l’un des points de départ du processus d’intégration économique régionale qui consacre la mise en place d’ une Zone de Libre Echange SADC(ZLE) programmé pour 2008, et une Union Douanière de la SADC en 2010. Dans les deux cas, le Congo n’est pas au rendez-vous.
Autre chose : savoir sélectionner des projets de développement. Au niveau de la SADC, il est question de financer le projet INGA III pour fournir de l’énergie électrique à plusieurs pays de la région. Précisément à l’Afrique du Sud, à l’Angola et à la Namibie qui sont de grands demandeurs. Tout le problème est de savoir comment présenter et défendre ce dossier utilitaire.
LES PERSPECTIVES POUR LA RDC
Au terme de la réunion de Kinshasa, la présidence reviendra à la RDC. Ainsi, le président de la République, Joseph Kabila Kabange succèdera à Jacob Zuma, président de la République sud-africaine.
Il s’agit là des charges supplémentaires qui viennent de s’ajouter pour autant que le chef de l’Etat congolais est également président en exercice de la CEEAC. Charges supplémentaires mais importantes, car il est question de faire progresser les choses sur le plan de développement et de la croissance économique.
En accédant à la présidence de la SADC, la RDC devra assumer son rôle de leadership en menant une mission des ministres des Finances de la SADC auprès des pays du G 20 et du FMI. L’objectif à atteindre est d’amener les pays du G 20 et du FMI à honorer leurs engagements en ce qui concerne l’allocation de 250 milliards USD, d’obtenir la réduction de la dette dans le cadre du programme PPTE et de rappeler des engagements vis-à-vis des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD). Entre-temps, la RDC devra proposer à ses collègues le bien-fondé de ses accords avec les entreprises chinoises pour bénéficier de leur soutien lors des tractations avec le FMI et la Banque Mondiale.
Du point de vue commerce, industrie, finances et investissement, la RDC pourrait bénéficier de tous les avantages prévus dans le processus d’intégration portant création d’une Zone de Libre Echange et Union douanière avec l’importation des produits stratégiques, notamment le pétrole et le ciment. Mais à la seule condition de signer le « Protocole commercial » et faire des propositions dans ce sens.
Etant actuellement dans la phase de reconstruction, la RDC pourrait obtenir un financement dans le cadre du Fonds de Préparation et d’élaboration de Projets de la SADC (PPDF). Ce qui lui permettrait de diversifier ses investissements.
Autre avantage, la RDC devrait envisager d’introduire une demande d’adhésion auprès du « Groupe contre le blanchiment d’argent de l’Afrique orientale et australe », ESAAMLG. Dans un premier temps, le Congo accèdera au poste d’observateur pendant qu’ il prépare des stratégies visant à combattre ce fléau. Les pays de la SADC ont apprécié la décision du président Kabila de créer un poste de « Conseiller spécial chargé de la lutte contre la corruption, le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme ». Quand on sait que la RDC est l’objet d’un pillage systématique de ses richesses par des maffieux, une telle opportunité est à saisir au bond.
Sur le plan de l’environnement et changement climatique, les pays de la SADC ont proposé que le « Centre régional du climat » soit établi en RDC. Cela conformément à la Déclaration de Namibie. Une décision qui se justifie dans la mesure où le Congo possède 60 % de l’essence forestière de l’Afrique en plus de ses immenses réserves hydrauliques grâce au Fleuve Congo, ses nombreux affluents et rivières. Il revient à la RDC, à travers le ministère de l’Environnement, de ne pas laisser échapper cette chance.
Dans le même ordre d’idées, la RDC à l’obligation économique de tirer profit des expériences des autres pour améliorer l’agriculture, se constituer des réserves alimentaires pour relever les défis de la crise alimentaire.
Une fois de plus, il revient à la RDC de prendre la mesure de tous ces défis. Point de place à l’amateurisme.