Le président de la République française, qui s’est défendu de donner des leçons, a rappelé aux « représentants de la nation congolaise » réunis au Palais du peuple les « vocations » de la République démocratique du Congo. Dont celle d’être la « colonne vertébrale de l’Afrique centrale ». Dans un discours pathétique, Nicolas Sarkozy a affirmé être « venu saluer un pays que la France porte dans son cœur (…), un géant : la République démocratique du Congo ». Il s’est dit « convaincu qu’aujourd’hui, dans cette région d’Afrique centrale, l’heure est venue d’écrire un nouveau chapitre de l’histoire de votre pays » et que « le Congo, plus encore que les autres nations d’Afrique, a rendez-vous avec son destin ». Il faut espérer que les acteurs politiques congolais ont bien appréhendé la quintessence du message du chef de l’Etat français, lu en présence du président de la République démocratique du Congo, Joseph Kabila.
Le président de la République française, arrivé à Kinshasa en visite de travail à l’invitation du président Joseph Kabila, s’est adressé à 11H30 aux « représentants de la nation congolaise » réunis au Palais du peuple.
Saluant en la RDC « un géant » africain, il s’est refusé de « donner des leçons » aux Congolais. «Je ne suis certainement pas venu vous dire ce qu’il faut faire », a-t-il assuré, en prenant le soin d’indiquer que « la vocation du Congo n’est pas d’être le maillon faible de l’Afrique centrale ». Pour lui, « le Congo a vocation à être la colonne vertébrale de l’Afrique centrale ».
Déplorant le fait que la RDC « reste pauvre » à cause du « gâchis » qui y règne alors qu’elle a « la fortune à portée de main », il a interpellé les parlementaires congolais. « La faiblesse du Congo veut dire l’instabilité de l’Afrique » cependant que « l’Afrique et le monde ont besoin de vous », leur a-t-il dit.
Soulignant « la souveraineté inaliénable du Congo » en relation avec « l’intangibilité des frontières » que le président du Sénat, Léon Kengo wa Dondo, a évoquée dans son mot de bienvenue, Nicolas Sarkozy a affirmé que la France va continuer à appuyer le processus de réforme des Forces armées de la RDC et de la justice congolaise.
« La première vérité, c’est que la souveraineté du Congo est inaliénable et la France sera toujours à vos côtés pour le respect de cette souveraineté », a-t-il déclaré, plaidant pour un « Congo fort, uni, debout ».
« Quel autre pays que la France l’a défendue avant tant d’ardeur ? Ce n’est pas avec moi que ça va changer », a-t-il rassuré.
Il a aussi salué la « fragile démocratie congolaise » et le succès des élections organisées en 2006 résultant d’une transition réussie grâce au président Joseph Kabila.
C’est dans cette foulée qu’il a souhaité voir les autorités congolaises organiser les prochaines élections locales « dans un délai raisonnable », promettant de mettre à disposition cinq millions d’euros pour développer les seize alliances franco-congolaises.
Coopération économique régionale
Nicolas Sarkozy a proposé, à la RDC et à ses voisins proches (Rwanda et Burundi, Ouganda et Tanzanie) et éloigné (Kenya), la création d’une « agence régionale pour le développement et l’aménagement ». Dans cette perspective, il a promis d’accueillir, en 2010 à Paris, une conférence des bailleurs de fonds pour soutenir la coopération économique dans l’Afrique des Grands Lacs.
A son avis, cette démarche contribuerait au « bon voisinage » dans la région et donnerait un « nouvel élan » à leur coopération autour de « projets qui fédèrent » en matière de transports, d’énergie, de filières agricoles ou industrielles. « La paix et la prospérité de l’Europe se sont construites sur ces bases », a-t-il rappelé.
« Vos relations avec vos voisins de l’Est doivent s’établir sur des bases radicalement nouvelles », a-t-il suggéré, en évoquant les opérations militaires conjointes des armées congolaise et rwandaise contre les FDLR au Nord-Kivu (20 janvier-25 février 2009) et qui ont permis d’y ramener le calme. « Je veux y voir les prémices d’une véritable refondation de la région, car une coopération structurée, c’est la certitude pour tous d’être gagnants », a encore affirmé Nicolas Sarkozy.
« S’ils organisent leur bon voisinage, les peuples d’Afrique centrale vivront riches et en paix. (Mais), si c’est la loi du plus fort, les peuples d’Afrique centrale resteront pauvres et malheureux », a averti le président français. « Les Congolais ont trop souffert et nous ne pouvons plus l’accepter », a-t-il affirmé, en pensant au pillage des richesses minières par les chefs des milices pour acquérir des armes avec l’argent gagné.
A travers des « projets qui fédèrent », la RDC et ses voisins de l’Est pourront « travailler ensemble pour structurer des filières agricoles, commerciales, industrielles, introduire davantage de transparences et de règles, développer des ressources énergétiques, protéger le patrimoine naturel (...) organiser la circulation des personnes » et même développer des infrastructures. La France, a signalé Sarkozy, a déjà pris langue avec d’éventuels bailleurs de fonds pour évoquer le financement de tels projets. « Vous devez réussir », a-t-il lancé à l’endroit des acteurs politiques congolais.
Tête-à-tête Kabila-Sarkozy
Aussitôt après la séance académique du Palais du peuple, les présidents Joseph Kabila et Nicolas Sarkozy ont eu un entretien en tête-à-tête au Palais de la nation au cours d’un déjeuner offert par l’homme d’Etat congolais. Ils ont aussi déposé une gerbe de fleurs au mausolée de M’Zee Laurent-Désiré Kabila, assassiné le 16 janvier 2001.
Dans la suite de Sarkozy qui s’est engagé à ce que la France aide la RDC à « effacer le fardeau de sa dette », des représentants du patronat français ont finalisé jeudi à Kinshasa un accord de protection des investissements qui « devrait contribuer à relancer la présence française dans ce pays richement doté en richesses naturelles ».
« D’ores et déjà, le géant du nucléaire Areva a signé un accord qui lui permettra d’exploiter un gisement d’uranium dans la province du Katanga », a relevé la presse internationale.
Cette visite-éclair a-t-elle permis à la RDC et à la France de dissiper tout malentendu ? La réponse semble être affirmative dès lors que les deux parties se sont engagées à œuvrer dans un partenariat positif.