« Les deux gouvernements ont plus ou moins répété ce qu'ils avaient déclaré lors de précédentes rencontres, mais leurs déclarations ne permettent pas vraiment de comprendre ce que chacun attend de la part de l'autre, en vue d'un rétablissement d'une paix durable », a expliqué Philippe Biyoya, professeur de science politique et de droit à l'université protestante de Kinshasa, capitale de la RDC.
Selon le professeur Biyoya, le Rwanda doit expliquer clairement au gouvernement de la RDC qu'il souhaite obtenir son soutien et ne veut pas faire de propositions aux miliciens Interahamwe ni aux Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR).
Quant à la RDC, elle doit avoir une position cohérente vis-à-vis du commandant tutsi prétendument soutenu par le Rwanda. Le général Laurent Nkunda a repris ses attaques contre l'armée congolaise, obligeant des milliers de personnes à fuir son bastion de l'est de la RDC. M. Nkunda prétend protéger les Tutsis de la région du Kivu des extrémistes hutus du FDLR.
Charles Murigande, le ministre rwandais des Affaires étrangères, a rencontré Mbusa Nyamwisi, son homologue congolais, à Kinshasa le 3 septembre au cours d'une visite de trois jours. Les deux ministres ont abordé la consolidation des relations entre leurs pays respectifs, la présence en RDC des ex-FAR (Forces armées du Rwanda, impliquées dans le génocide de 1994), et le problème du général M. Nkunda.
« Les ex-FAR et Interahamwe posent un problème, d'abord pour les Congolais, parce qu'ils tuent, violent et volent chaque jour, mais ils représentent également une menace permanente pour le Rwanda », a déclaré M. Nyamwisi à la presse. « Ces rencontres nous permettront de trouver une réponse pour le peuple et le gouvernement. Nous devons empêcher que le problème ne s'aggrave, car il est possible qu'il s'aggrave ».
« Les ex-FAR et Interahamwe, alias les FDLR, sont en grande partie responsables de l'insécurité et de l'instabilité dans la région ; ils restent militairement et politiquement très actifs en RDC, et représentent aujourd'hui encore une menace grave pour nous tous. Leur campagne a créé un environnement propice à l'émergence de facteurs aggravants comme le problème du général Nkunda », a noté M. Murigande.
Oeuvrer pour le désarmement
Les deux ministres ont effectivement annoncé leur volonté de redonner un coup de fouet aux programmes destinés à pacifier et à normaliser les relations entre leurs deux pays. En particulier, « les deux parties ont dit qu'elles mettraient tout en ouvre pour désarmer les ex-FAR et Interahamwe et les renvoyer au Rwanda », peut-on lire dans le communiqué publié conjointement à la clôture de la session.
Ils ont également réitéré leur adhésion aux principes du Pacte sur la paix, la stabilité et le développement dans la région des Grands lacs. Ils se sont référés à l'article cinq du traité, qui stipule que « les parties doivent s'abstenir de déployer ou de soutenir des groupes d'opposition armés ou des groupes rebelles impliqués dans des conflits armés ou se livrant à des actes de violence ou de subversion contre le gouvernement d'un autre Etat ».
Le communiqué évoque également l'établissement d'une commission tripartite (RDC, Rwanda, Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés) chargée d'organiser le rapatriement des Congolais réfugiés au Rwanda.
Les deux ministres ont également déclaré que la réouverture de la frontière entre leurs deux pays dépendrait des dernières évolutions de la situation de sécurité dans l'est de la RDC.
« Nous sommes convaincus que le problème de M. Nkunda est avant tout un problème congolais qui doit être résolu par le Congo, mais qui a des conséquences pour le Rwanda », a expliqué M. Nyamwisi. « La plupart de nos discussions ont porté sur cette question et [sur la manière de] réduire le spectre de la déstabilisation dans la région [est de la RDC] ».
M. Murigande dirigeait une mission de quatre hauts responsables, première délégation de ce type depuis 1998. La RDC accuse le Rwanda de soutenir les rebelles qui opèrent sur son territoire, tandis que, selon le Rwanda, le Congo servirait de refuge aux forces Interahamwe qui s'étaient rendues coupables d'actes de génocide au Rwanda en 1994.
ei/bp/eo/mw/nh/ads
KINSHASA, 6 septembre 2007 (IRIN) - La rencontre récente entre hauts responsables rwandais et congolais a permis de parvenir à une certaine entente sur les stratégies à adopter pour réduire les tensions entre les deux pays, mais aucune solution n'a été trouvée pour traiter de manière radicale le problème de la rébellion dans l'est de la République démocratique du Congo (RDC), selon un analyste.
Photo: MONUC