Le CNDP de Nkunda se bat pour conserver ses avantages. Notamment exercer la mainmise sur la mine de niobium (coltan) héritée du Rassemblement congolais pour la démocratie (RCD/Goma). Exploité par Krall Metal, une firme australienne, ce gisement, situé à Lueshe dans le Masisi, province du Nord Kivu, constitue la principale source de financement de la guerre du général rebelle. Global Whitness le révèle dans l’extrait ci-après de son rapport.
Le coltan est un minerai à partir duquel sont extraits les métaux précieux que sont le columbium (également appelé niobium) et le tantale. Le tantale entre surtout dans la fabrication de condensateurs pour appareils électroniques tels que les téléphones portables et les ordinateurs.
La RDC dispose de gisements considérables de coltan et, lorsque la demande internationale et les cours sont montés en flèche en 2000, diverses factions militaires n’ont pas tardé à utiliser le commerce du coltan pour financer leurs activités. De nombreux rapports très documentés ont été rédigés sur ce problème et des recommandations ont été faites sur la façon de séparer les ressources du pouvoir. Peu de ces recommandations ont cependant été mises en oeuvre, et le commerce a fini par ralentir, non pas suite à une quelconque action tangible de la part du gouvernement de la RDC ou de la communauté internationale, mais simplement en raison de la chute du cours du coltan. 64 % des réserves mondiales de coltan connues se trouvent en RDC.
Bien que l’Australie soit actuellement le plus grand producteur de coltan, il est estimé que l’Afrique possède 80 % des réserves mondiales, dont 80 % se trouveraient en RDC.
On trouve également des gisements de coltan au Canada, au Brésil, en Thaïlande, en Malaisie et en Chine.
La consommation mondiale de coltan a augmenté brusquement en 2000 pour atteindre environ 2 268 tonnes, une augmentation de 38 % par rapport à l’année précédente, dopée principalement par la croissance du secteur de l’électronique. Les prix ont culminé à 164 dollars le kilo en novembre 2000 et la population de l’est de la RDC a soudain été entraînée dans une ruée sans précédent vers le coltan. En 2002, les États-Unis étaient la principale destination des exportations de coltan de la RDC.
Les mineurs congolais travaillaient à l’extraction du minerai tandis que les négociants rwandais (et parfois ougandais) en faisaient le commerce. L’activité était très organisée et coordonnée centralement depuis un organisme administratif connu sous le nom de Bureau du Congo, situé au ministère rwandais de la Défense. Pendant toute la guerre, le Rwanda a profité directement de l’exploitation du coltan dans l’est de la RDC, et l’on a laissé entendre qu’entre fin 1999 et fin 2000, l’armée rwandaise avait à elle seule encaissé des revenus d’au moins 20 millions de dollars par mois. Ce phénomène a débuté lorsque le RCD s’est emparé du pouvoir au Kivu en août 1998.
Les leaders du RCD ont commencé à piller les réserves de coltan avec leurs partenaires rwandais. Peu après la mise en place du nouveau gouvernement rebelle du RCD, le parti s’est mis à prélever ses propres taxes sur les exportations de coltan. Par exemple, de 1998 à 2000, le RCD a contraint chaque poste ou comptoir d’échange opérant sur son territoire à verser 15 000 dollars pour obtenir un permis de 12 mois. Les comptoirs sous licence ont également dû payer une taxe estimée à 8 % de la valeur totale des exportations. La société SONEX a été fondée en mars 1999 à Kigali par le RCD-G afin de servir de bras financier de l’organisation et d’établir un processus applicable au transfert des ressources comme le coltan entre le RCD et Kigali. Cette situation a changé le 20 novembre 2000 avec la création d’une autre société, la SOMIGL, à laquelle le RCD-G aurait accordé le monopole de toutes les exportations de coltan provenant des territoires détenus par les rebelles. Le monopole, mis en place pour financer l’effort de guerre du RCD-G, constituait une réponse directe à la montée brutale des cours du coltan.
La SOMIGL aurait permis au RCD de financer sa propre armée pour la première fois. Sous le contrôle de Nestor Kiyimbi, le ministre des Mines du RCD, l’argent du coltan aurait servi à entretenir une armée du RCD forte de 40 000 hommes. Cependant, les cours ont chuté considérablement fin mars 2001 (atteignant un niveau plancher en octobre 2001 représentant moins du tiers de leur niveau le plus élevé) et la direction du RCD a décidé d’abandonner le monopole de la SOMIGL, en libéralisant de nouveau le marché. En plus du contrôle de l’exploitation du coltan par l’armée rwandaise et le RCD, il a été rapporté que des groupes Maï-Maï prélevaient des taxes sur les mineurs de coltan dans des endroits tels que Ntoto dans la zone de Masisi, au Nord-Kivu.
La paix sous tension: Dangereux et illicite commerce de la cassitérite à l’Est de la RDC / Global Witness (Washington DC - Etats-Unis) – 2005.